PIERRE MIGNOT, un personnage, mon maître pour l’apprentissage de la gravure et de la vie.
Profession : professeur d’atelier de gravure en modelé à l’école Boulle de 1963 à 1991.
De Nicolas SALAGNAC
Cette image sur Facebook et une demande d’information d’une ancienne élève de Pierre Mignot, Nelly Gable, me poussent à écrire un hommage à notre professeur d’atelier en gravure en modelé/gravure acier à l’école Boulle. En recherchant des informations sur lui, nous découvrons qu’il n’y a rien.
Ce texte hommage est une association des textes de chacun… J’ai fais un texte de base et je mets à la suite les textes que je reçois des anciens élèves et anciens collègues de Pierre Mignot.
Rendre hommage à nos anciens est un axe auquel j’accorde du temps. Nous sommes entrés dans le 21e siècle avec notamment une transition que l’on n’imaginait pas encore à la fin du 20e siècle, le passage de l’an 2000, et le tout ou presque tout numérique.
SOUVENIRS ET ANECDOTES DES ANCIENS ÉLÈVES DE PIERRE MIGNOT.
Nicolas SALAGNAC, élève graveur en modelé de 1985 à 1990, promotion 99.
Graveur médailleur MOF à Lyon.
salagnac.graveur@gmail.com – 06 07 53 57 80 – Site web
J’ai été élève à l’école Boulle de 1985 à 1990.
J’y suis entré, un peu parce que mon grand-père, ébéniste m’avait dit du haut de mes 5 ans : « quand tu seras grand tu iras à l’école Boulle ». À 15 ans, suite à mon dossier scolaire qui est passable, je présente le concours de l’école Boulle, je suis le numéro 736… Nous sommes donc peut-être 1000 candidats, pour soixante places. Et la soixantième place est pour moi, c’est juste, mais ça passe. En septembre 1985, je quitte ma Bourgogne et deviens parisien. Je pousse les portes de la fameuse école et découvre une nouvelle vie. Nous sommes reçus par Pierre Gounand, de Vesoul… alors Proviseur de l’école Boulle. Je découvre qu’il y a 15 ateliers et pas seulement l’ébénisterie… Le provincial que j’étais n’était pas encore très au fait. Les premières années, les « Arpètes » que nous étions, passions d’atelier en atelier par petit groupe pour découvrir les métiers afin de faire nos choix. Au préalable, on nous avait demandé de remplir un document pour savoir si nous aimions travailler debout ou assis, travailler en petit ou en grand… afin de nous situer et pour aider à la bonne orientation pour le choix d’un des 15 ateliers. Je choisis :
1 – le moulage plastique (j’aimais le potentiel vers le design, le travail des formes),
2 – l’ébénisterie
et 3 – la gravure en modelé.
Je suis finalement pris en gravure en modelé… Je ne saute pas de joie… mais j’étais dans l’école souhaitée, pour dessiner et travailler de mes mains. S’ouvrait devant moi, une nouvelle page d’écriture de mon histoire. Voilà comment, je croise mon chemin avec celui de Pierre Mignot, mon professeur d’atelier, mon maître dans l’apprentissage de mon métier et mon père de substitution quand j’étais parisien.
C’est Nelly Gable, élève de Pierre Mignot de 1973 à 1980, qui me demandait quelques éléments sur notre prof d’atelier… Avec cette recherche, nous découvrons que nous n’avons rien. Pas d’images, pas d’archives photo, pas de textes, pas de biographie. Il n’a pas eu d’enfants et son épouse est décédée quelques mois après son décès.
Ma première étape de recherche aura été de prendre contact avec des anciens profs de l’époque : Michel Lasnier, professeur de gravure ornementale ; Olivier Lebossé, professeur de tournage ; Jean Guénot, professeur de ciselure ; François Boissonnet, professeur de photo et Dominique Chevalier, professeur de déco, Alain Pommier, professeur de Monture en bronze. Ensemble et par recoupement, nous arrivons à dire que Pierre Mignot est arrivé comme professeur d’atelier de gravure en modelé à l’école Boulle en 1967 et il aura pris sa retraite en 1991. J’appelle aussi des anciens graveurs, qui l’ont côtoyé et qui sont passés par l’atelier de gravure en modelé d’Eugène Cannée. Bernard Turlan, Maître graveur de la Monnaie qui était là pour les CAP et les Diplômes des Métiers d’art. Bernard était à l’école Boulle de 1948 à 1952, un an avant Pierre Mignot qui a été élève de 1949 à 1953. Jean-Paul Caillouët, élève de 1951 à 1955 et par la suite graveur de matrices de couvert, MOF en 1982 et souvent membre des jurys de gravure à Boulle. Pierre Rodier élève de 1953 à 1958, il sera le graveur général des Monnaies jusqu’en 2000. Ces graveurs de renoms ont participé avec Pierre Mignot au bon déroulement des formations en gravure en modelé, aux jurys…
A mon arrivée nous avions le DMA (Diplôme des Métiers d’Art) un nouveau diplôme à l’école Boulle.
J’intègre donc l’atelier de Pierre Mignot en 1985. Notre premier travail sera de réaliser nos outils : burins plats, ronds et onglette… à la lime… Nous sommes 4 : Christelle, Claudine, Bruno et moi. Il faut être droit, horizontal, les pans à 45° ne sont pas à 50°, l’affûtage des outils est à 55°. Les premières gravures dans un bloc d’acier… sont des formes géométriques, simples puis plus compliquées.
Les premiers échanges avec Pierre Mignot étaient sur le bizutage. Il n’appréciait pas beaucoup et nous mettait en garde. Nous découvrions son côté paternel.
Les cours en l’atelier étaient quasiment toutes les après-midi de la semaine, c’était une joie pour moi. Les heures tournaient sans compter. Nous finissions notre semaine le vendredi à 17h. Nos outils sont rangés, les établis propres et passés au Kerdane, l’atelier est balayé… et nous, les apprentis graveurs, sommes tous réunis, les premières, deuxièmes, troisièmes et quatrièmes année, soit 16 élèves, filles et garçons, pour saluer Monsieur Mignot et lui souhaiter bon week-end.
Nous avons passé 4 ans ensemble.
J’ai encore en tête une multitude d’images, de photos… et aujourd’hui pour lui rendre hommage, aucun cliché. À l’époque les selfies (ou égoportrait en Québécois) n’existaient pas, et nous n’aurions jamais amené un appareil photo pour tirer des portraits… Il avait des yeux bleus, terribles, perçants, profonds et légers. Il avait le teint hâlé, un petit bouc sur le menton, toujours rigoureusement taillé. Il parlait d’une voix posée, je ne l’ai jamais entendu crier. Il émanait de lui une autorité naturelle… Il était très respecté. Il était droit, sans excès, rigoureux, et d’une méticulosité obsessionnelle. Il faisait preuve d’une intolérance maniaque de l’approximatif. Son univers était classé en tiroirs, chaque chose à sa place, pas de compromission, pas de complaisance, toujours d’une probité absolue, et en permanence insatisfait, dixit Dominique Chevalier.
Sur sa tenue vestimentaire était rigoureuse, de couleur entre marron et vert. Pantalon et veste de costume, chemise, gilet, pull en V et sorte de Béret casquette, confectionnée par son épouse. Et sa blouse d’atelier, brune. Rangé dans sa poche de blouse, de petites lunettes formées de petits verres rectangulaires qu’il chaussait sur le nez. Avec parfois en plus, ses loupes de graveur, sorte de petites rallonges métalliques avec deux verres à quelques centimètres du nez. Un petit cartable en cuir noir pour nos copies et quelques documents succincts, car peu de place et une sacoche pour ses papiers.
Notre progression à l’atelier se faisait en ligne, car les établis des élèves se prolongeaient tous le long du mur et de la verrière qui donnait sur la rue Pierre Bourdan… Nous commencions, vers la forge en première année et nous finissions en quatrième année près du bureau de Pierre Mignot. Ce grand bureau en bois, large, avec des tiroirs multiples où étaient les rifloirs, les limes aiguilles, les échoppes…
Les voyages :
Pierre Mignot, c’était aussi les voyages… et pas n’importe quels voyages… toujours intarissable sur ses moments vécus avec sa femme, dans des lieux les moins touristiques possible, pour pouvoir aller au cœur des régions traversées, des gens rencontrés… Il était plein d’anecdotes sur ses rencontres, ses moments vécus, souvent rapportés sous forme de diapositives… Un amoureux inconditionnel de la couleur, de la forme, des rapports entre les formes, de l’histoire de l’art, du patrimoine…
Voici quelques souvenirs :
Voyages au Maroc avec son combi Volkswagen.
J’ai le souvenir d’une anecdote au Maroc. Souvent proche des habitants, dans des petits villages, un jour, il est amené par des villageois avec insistance jusqu’à une maison… et ils le font entrer dans une pièce seule, où une jeune femme enceinte est un peu inquiète. Il comprend la situation et fait une sorte d’auscultation, prend le pouls et rassure la jeune femme puis quitte la pièce. En tant qu’Occidental, avec son petit bouc et ses lunettes, il a été pris pour un médecin.
Voyages en Norvège, toujours avec son combi Volkswagen. Il aimait le caractère nordique. Un jour, dans un camping sans gardien, et simplement un mot et une sorte de tirelire pour s’acquitter de la nuit passée… En France disait-il, impensable de laisser de l’argent ou de régler ce que l’on doit sans y être “forcé”…
Il a ramené beaucoup de diapositives de la nature, des fjords, des glaciers… Toujours à la recherche de détails, d’un angle curieux, particulier, nouveau… Avec un grand sens de la composition, et dignes des grands reporters globe-trotters.
Un voyage aussi, particulier voir dangereux je dirais, sur les traces de l’ancienne Babylone. Les lieux sont flous dans mon souvenir entre la Jordanie, la Syrie, et l’Iran… Toujours en combi et autonome, Pierre Mignot rêvait de visiter des lieux non accessibles. Mais un matin il entend à la radio l’ouverture des frontières, il décide de s’engager vers ce pays… Et sur la route, ils se font tirer dessus… Ils doivent faire demi-tour.
Dominique CHEVALIER, professeur de déco et autre… se souvient :
Un voyage au Vésuve, avec sa femme dans le combi Volkswagen aménagé par lui même. L’habitacle est sophistiqué, rabattable, et escamotable avec un contreplaqué aviation, riveté, et une isolation à toute épreuve et pour cause. Ils s’approchent du Vésuve qui tousse… J’imagine qu’il aimerait être au plus près pour faire des images et voir cette nature furieuse. Mais les conditions se dégradent, il faut s’abriter, ils sont loin de tout… Ils se calfeutrent alors dans le véhicule et restent bloqués trois jours…
Photo “Jours de France” pour le centenaire de l’école Boulle, ici l’atelier de gravure en modelé :
Je reconnais : au premier plan : Philippe PRADEL (en noir), en face Patrice LEGUEREAU (en bleu), derrière lui, ma tête ; à ma gauche Bruno LESSAGE, Prakash TOPSY, Yvan HIOT, Isabelle JOLLY, Isabelle BEAUSSIER (mais pas sur), Isabelle COURTILLE (en noir), Franck MERCKY, Lionel ACAT, et au fond Franck RENAULT ???
1986, le centenaire de l’école…
C’était ma deuxième année et ce fût une année particulière… Nous étions tous sur le pont, pour participer au préparatif du baptême des p’tits nouveaux, et repeindre l’intégralité de la cour, en une piste de décollage pour relier 1886 à 1986… J’ai participé à la maquette de l’avion entre Airbus et les premiers avions…
À l’atelier de gravure en modelé Franck Renaud, alors en 4e ou 5e année, travaillait sur les matrices du pin’s du centenaire, frappé en argent et en bronze…
Une petite anecdote… Je crois que c’était sur la matrice de revers… Pierre Mignot, pour soulager Franck, me confie une mission, un travail de polissage avec de l’huile, de l’émeri et un petit bâton de buis… C’est simple, mettre de l’huile, un peu de cette poudre et faire de petit cercle le plus régulièrement possible… Je m’exécute à la lettre, quelle mission… Et telle une petite fourmi, je poli, je poli et ne lève pas la tête de cette matrice. Je ne sais plus si c’est Franck ou Pierre Mignot qui m’arrête pour voir… Catastrophe, l’émeri que m’avait donné Pierre Mignot était trop gros, j’ai tout rayé. Franck était… dépité. C’est Pierre Mignot qui a donc repris mes bêtises et Franck de me dire : “mais tu ne regardais pas ce que tu faisais ! … Si, mais, j’ai juste appliqué les consignes, je ne savais pas qu’il pouvait y avoir plus fin”. C’est l’apprentissage, mais ma fierté de participer à cette matrice en à pris un coup.
La fête de l’atelier un rituel
Chaque année, l’atelier avait un petit rituel, la fête de l’atelier, organisée par les troisièmes années.
J’ai surtout deux souvenirs, dont un qui résonne encore…
En 1987, avec Christelle Fischer, Claudine Staat et Bruno Lessage, nous sommes en charge d’organiser cette fête d’atelier pour Pierre Mignot. Nous avons axé notre action pour lui remettre le meilleur cadeau du monde, forcément… Nos recherches se portent sur les pompiers… On savait qu’il adorait les pompiers (Cyrille Conrad me dit qu’il avait été Pompier de Paris – ceci explique cela) et qu’il rêvait d’avoir le dernier casque de pompier avec la feuille d’or en visière, mais voilà, cela ne se trouve pas à Casto… Nous décidons de pousser les portes de la caserne des pompiers de Reuilly, nos voisins… Avec une petite appréhension, comment va être prise notre demande…
Nous sommes très bien accueillis, merci, les pompiers… Mais un casque de pompier n’était pas du tout dans nos moyens… Le contact est bon, et l’officier voit notre contrariété… On discute, on échange, et je pense que l’on se dit tout haut, s’il y avait un camion de pompier dans la rue de l’école avec la grande échelle et que des pompiers viennent lui apporter le petit cadeau de ses élèves, ce serait top… Petit sourire, la demande nous paraissait osée, décalée… Mais il nous dit : si le jour J, la grande échelle est disponible on le fait, ce n’est pas loin, et sinon, un plus petit camion avec une petite échelle.
Génial, fier d’avoir osé… Mais notre atelier est au rez-de-chaussée. Je ne sais plus comment on y arrive, surement avec la complicité de Michel Lasnier. On décide donc de faire la fête d’atelier au premier étage avec les graveurs ornementaux.
Nous étions très peu dans la confidence, pour que cela reste une surprise. Il aura fallu de l’énergie pour bouger tout le monde ailleurs que dans notre atelier. Et finalement, notre goûter commence, à l’étage. Je crois que c’est Bruno qui était resté en bas dans la rue, pour attendre les pompiers et indiquer la fenêtre qu’il fallait viser.
Le temps passe… Viendront, viendront pas.
La tension monte et le goûter se déroule… Et puis à l’heure dite, le gyrophare et le son caractéristique de la sirène. C’est l’effervescence… Pierre Mignot en tête, c’est les Pompiers… C’est dans la rue, ils s’arrêtent… Ils manœuvrent… Les pompiers sont en train de nous faire le grand jeu, avec la grande échelle… Nous sommes tous aux fenêtres… L’échelle se déploie et se dirige vers nous… Deux pompiers en tenue montent… Ils frappent à la fenêtre, on laisse Pierre Mignot ouvrir… Les pompiers passent la fenêtre et tendent notre petit cadeau (le dernier livre sur les pompiers) et le pompier dit : Monsieur Pierre Mignot ! De la part de vos élèves…
Et ils repartent… Cela a duré 4 minutes, efficaces, précis avec un impact maximum.
Merci, les pompiers, car je crois bien que l’on a touché notre professeur d’atelier. Beau souvenir…
Et le deuxième et plus marquant souvenir : J’étais alors en deuxième année, dans le cadre de cette fête d’atelier, nous sommes tous réunis pour un goûter convivial, avec des échanges ouverts.
Pierre Mignot prend la parole et commence à nous raconter une histoire. Cette histoire se déroule dans ce même cadre, mais plus tard au 21e siècle…
Les élèves graveurs de ce nouveau millénaire sont ici à l’école Boulle, atelier de gravure en modelé, en plein goûter. Le professeur de gravure se lève, les élèves comme un seul homme se taisent. Le professeur se dirige vers son bureau, il sort une clé de sa poche, ouvre une porte de son bureau et sort une pièce recouverte d’une toile masquant son contenu.
La pièce est apportée vers l’assistance. La toile est soulevée, on voit une cloche de verre qui s’ouvre grâce à une deuxième clé. Il ne reste qu’un plateau que le professeur soumet à un premier élève, il le prend, regarde, les yeux écarquillés, émerveillés et passe à son voisin…
Le plateau fait le tour, passe par toutes les mains et revient à son point de départ. La cloche est remise, le tissu repositionné renfermant ainsi dans le noir le contenu de ce plateau… Et le tout est remis dans le bureau et sera ressorti l’année prochaine.
Voilà l’histoire disait Pierre Mignot. Je crois que nous étions tous surpris par cette histoire et cette chute… Il n’y avait plus un bruit…
Au bout d’un petit temps, une question est pour chacun de nous à l’esprit. Mais qui avait-il dans ce plateau ?
Un burin, une onglette et un marteau de graveur. Oups.
La couleur des machines de l’atelier :
Un jour, je ne sais pas ce qui m’a passé par la tête, je vais voir Monsieur Mignot pour lui dire que nous sommes une école d’art, nous sommes des artistes (en herbe) et que franchement la couleur des machines vert insipide… Cela pourrait être plus gai, des couleurs plus vivantes…
Sa réponse : “la couleur des machines outil est verte et c’est la norme, point.”
Être Meilleur Ouvrier de France :
Au niveau de la rue Pierre Bourdan, nous étions deux ateliers à nous partager le rez de chaussé, l’atelier de gravure en modelé de Pierre Mignot et le tournage de Pierre Macardier. Pierre Macardier était Meilleur Ouvrier de France en 1976 en tournure sur bronze. Il était un personnage imposant, grand de taille et avec une voie qui portait. Il se présentera à la présidence nationale des Meilleurs Ouvriers de France, mais il ne sera pas élu. Il aura aussi travaillé et porté une licence en mécanique de cycle 3, fait rare et remarqué à l’époque.
Mignot et Macardier était un sacré tandem, mais je me souviens Pierre Mignot disant à Macardier : “OK, tu es Meilleur Ouvrier de France, mais tu es MOF quand tu as passé le concours et aujourd’hui, es tu toujours MOF, es tu toujours au niveau ?”.
Cela m’avait marqué à l’époque, et pourtant, je ne connaissais pas les MOF. Aujourd’hui MOF depuis 2000, forcément cette phrase reste présente.
Le DMA, acte final pour moi, entre 1988 à 1990 suite et fin de ma formation.
Un souvenir en quatrième année, le stage en entreprise… Je me souviens juste de cela… Pierre Mignot me demande : “Salagnac…”
J’arrive et vais vers son bureau…
“C’est pour votre stage… Avez-vous une cravate ?”
“Non, je réponds…”
“Alors vous prendrez celle de votre père et vous vous présenterez lundi matin 9 heures au 13 rue de la Paix…”
“Oui et pourquoi faire ?”
“La Maison Cartier, dessins de bijoux…”
“Mais je n’aime pas particulièrement les bijoux…”
“Lundi matin, 9h, demandez Cyrille Conrad…”
Le lundi matin au pas de la porte dans un costume de circonstance, je suis sous le n°13 de chez Cartier. Je monte au dernier étage, sous les toits, au bureau de création. Un stage d’un mois, j’ai adoré et fait un rapport de stage, comme une relique, avec mes dessins, j’ai décodé toutes les étapes, j’ai parlé de l’histoire de la maison, l’évolution des techniques de rendus… J’ai demandé à voir tous les métiers qui gravitent autour du rendu dessiné pour la création d’un nouveau bijou. Depuis, forcément, je ne regarde plus les bijoux avec le même œil.
Cette année-là en DMA1, nous avons comme sujet l’inauguration du nouvel Opéra Bastille, nous visitons le chantier et je travaille sur un gaufrage pour le carton d’invitation à l’inauguration… J’y ai mis tout mon cœur et mon énergie.
En DMA2, cette fois c’est pour de vrai… Sujet : création d’une pièce en lien avec un pays européen.
Je choisit la Norvège, influencé forcement par les belles images de Pierre Mignot, ses récits de ce Grand Nord, du cercle arctique, et de cette nature forte et puissante.
Cela dure un an. Le projet se construit, on cherche, on dessine, on argumente, nous avons des réunions de travail avec notre prof de déco, Michel Baduel, si je me souviens bien et notre prof d’atelier. Michel Baduel me dit : “Aaaaahh les graveurs, arrêtez avec vos crayons 2h. Prenez des spalters. Allez-y, merde, sortez-vous les tripes…”. Et Mignot : “oui, mais comment on fait ? On doit pouvoir réaliser derrière…”.
Je m’embarque sur un projet avec 4 matrices… Je fais la création du support et de la taille directe pour deux matrices et deux matrices en électro érosion avec reprise main… Le tout argenté.
La tension des derniers soirs avant le rendu la pièce pour le jury est palpable. Je revois le temps et les nuits passés pour polir ma pièce à la maison. Des ampoules aux doigts, de la fatigue, de la tension, mais que du bonheur. Belle expérience et bon démarrage pour la vie professionnelle, nous sommes en juin 1990.
La suite pour moi est une année de service militaire comme matelot photographe au Musée de la Marine du Trocadéro. Je reviens de temps en temps à l’atelier, on ne le quitte pas comme ça du jour au lendemain.
Pierre Mignot prend sa retraite en 1991, je crois. Puis le monde du travail… Là, je me retrouve un peu seul… et oups, je dois aller pointer à l’ANPE… Je commence comme assistant-photographe, avec Pascal Faligot. Il travaille beaucoup pour l’Hôtel Drouot…
En 1992, je reviens à la gravure et travaille pour Stefen Bisser, c’est la période du pin’s.
Puis, je suis débauché pour aller travailler à Lyon chez FIA. C’est Bernard Le Hir qui m’a conseillé auprès de Claude Cardot, MOF graveur, sollicité pour trouver un remplaçant à Mr Redon à Lyon.
Je garde un lien avec Pierre Mignot, je lui donne de mes nouvelles par quelques courriers, et une carte de vœux chaque année. Il répond toujours, sur une petite carte, dans une petite enveloppe avec une belle écriture soignée.
Je le sais malade, mais je n’ai jamais su dans le détail. Il n’en parlait pas, ne disait rien.
Dernière entrevue :
Suite à ma réussite au concours national du Grand Prix des Métiers d’Art de la SEMA (Société d’Encouragement des Métiers d’art devenu aujourd’hui INMA), en métier de tradition, je suis invité par la SEMA à venir montrer mes créations, mon métier de graveur médailleur et ma passion à un public de connaisseur, au Salon des Créateurs et des Antiquaires sur les fontaines du Trocadéro en novembre 2006.
Comme à chaque fois, j’ai invité Pierre Mignot. Et j’ai eu la joie de le revoir, je ne m’y attendais pas… Je le reconnais au loin, avec son épouse. C’est un moment resté gravé, il était heureux d’être là de voir mon travail. C’est la dernière fois que je l’ai vu.
Il est décédé des suites de sa maladie et son épouse un an après.
Photos (trop rare) :
De la gauche vers la droite :
Pierre MIGNOT, professeur de gravure en modelé, son épouse, dame blonde à l’arrière inconnue, femme de Serge LAVERDET, Serge LAVERDET, professeur de déco, Anne Caroline LEHOVETZKI (sculpture) de ma promo, Emmanuel LEMAGNEN, jeune brune est la soeur d’Anne-Cécile VISEUX (dixit Jean GUENOT, ancien professeur de ciseleur), Michel HUDAN, professeur de menuiserie en siège, jeune brun inconnu (un élève de l’École Boulle), jeune brune Virginie MALAQUIN (gravure ornementale), Pierre RAMOND, professeur de marqueterie, fille de Serge LAVERDET, homme brun à moustache inconnu (de La Réunion), élève trompettiste inconnu (un élève de l’École Boulle), Hervé MOULIN (ciselure) de notre promo, Claude BOURNILLAT (Chef de Travaux).
Mariage de Franck et Cécile Renault / Le Guern en 1992, avec Pierre Mignot (photo noir et blanc, Nicolas Salagnac). Merci Cécile et Franck.
Anne Caroline LÉHOVETZKI, élève sculpteur de 1985 à 1990, promotion 99.
“Nicolas, je ne peux qu’abonder dans la description de cet infatigable voyageur : Il est partit une semaine avant nous à la Réunion, en Juillet 1990. Il loua un utilitaire et fit, avec son épouse, le tour de l’île en camping. Lorsque nous sommes arrivés, notre programme de découverte était tout préparé et l’utilitaire avait été remplacé par un mini bus prêté par la Région. C’est donc Pierre qui nous conduisait du volcan aux plages, à la découverte de l’île.”
Virginie MALAQUIN, élève graveur ornementale : 1984 à 1989, promotion 98.
Je me souviens d’un professeur aux yeux bleu, très clair et tellement persan que lorsqu’en tant qu’arpette on m’avait envoyé en gravure acier pour aller chercher une lime à épaissir… j’avais été très impressionnée. Monsieur Mignot, avec son petit sourire m’avait tendu une lime ce qui m’a permis de revenir à l’atelier sans être bredouiĺle.
Lorsque nous sommes partis à la Réunion en Juillet 1990, il avait emmené bien évidemment son appareil photo et ses objectifs et matériels Leica avec lesquel il a fait de très belles photos.
Mais ses photos étaient aussi l’œuvre de “Monette” sa si gentille épouse et son assistante dévouée. Elle lui tendait ses objectifs à chacunes de ses demandes, on entendait “Monette, objectif 180mm » et Monette aux petits soins était toujours opérationnelle.
Monsieur Mignot était un professeur très attentionné, très paternel qui savait être à l’écoute de ses élèves parfois dur mais tellement attentionné.
J’ai eu la chance de le revoir au Salon des artistes animaliers, où j’allais tous les ans voir mon ancien professeur M. Michel Lasnier. J’ai été très touchée du souvenir qu’il avait de moi et cela m’a fait très plaisir de le revoir.
Voilà Nicolas, ce n’est pas simple de te donner des anecdotes et des souvenirs précis, cela fait 28 ans.
Jean-Luc MARÉCHAL, élève graveur de 1962 à 1966, promotion 76.
Maître graveur de la Monnaie de Paris aujourd’hui à la retraite – jlmarech@club-internet.fr
Photo Jean-Luc Maréchal, Georges Bergevin (au milieu) et André Morlet, monteur en bronze, à droite.
“Mignot”, ou plutôt “Monsieur Mignot”.
Je suis rentré à l’école Boulle en septembre 1962. Après le premier trimestre de découverte des ateliers, j’ai choisi la gravure en modelé sur acier, métier qui avait eu ma préférence.
Notre professeur était Eugène Cannée, dit “Gégène”. Étant de la promotion 1906, je peux estimer qu’il était né vers 1890, et devait donc avoir environ 72 ans. Il était largement atteint par la limite d’âge, mais restait, faute de remplaçant. Durant cette première année, nous avons appris à forger nos burins, graver des volumes simples, maîtriser les différents outils, échoppes, rifloirs… et à supporter le léger bizutage des “anciens”.
À la fin du dernier trimestre, nous avons vu arriver un stagiaire. Il se tenait sagement au bout de l’alignement des établis, juste à notre droite et travaillait sans un coup d’œil vers nous. Évidemment, nous l’avons un peu taquiné, un peu nargué, lui annonçant les pires choses pour l’année suivante, car nous le prenions pour un postulant à l’entrée à Boulle…
À la rentrée de 1963, nous avons revu ce stagiaire qui s’est présenté : “je suis Monsieur Pierre Mignot, votre nouveau professeur”. Stupéfaits, nous avons regardé nos chaussures, nous étions un peu piteux, craignant quelques représailles. Mais il n’y eut pas de retour de bâton.
Nous avons rapidement appris à connaître ce tout jeune professeur et nous avons passé sous son professorat trois années sans une ombre. Il était de la promotion 1949 et ne semblait pas, au premier coup d’œil, bien plus âgé que nous ! Mais il avait une maturité, une sûreté, une maîtrise qui ne nous permit jamais de le considérer comme un grand copain ! Non, c’était Monsieur Mignot.
Je confirme ce que dit Nicolas Salagnac : Mignot était “carré”, pointilleux, organisé, précis, exigeant. Mais le métier de graveur sur acier exige toutes ces qualités qui peuvent apparaître comme des défauts aux yeux de certains.
Dans ma promotion, nous étions cinq, mais je m’entendais particulièrement avec Georges Bergevin, dit “Bébert”. Si je n’ai gardé aucune relation avec les trois autres, j’ai fait beaucoup de travaux en commun avec Bébert, surtout pour notre diplôme.
Après notre sortie en 1966, munis de notre diplôme, nous avons travaillé en commun chez son premier patron, José Gallego. Puis je suis parti en province, à Lyon puis à Bourg-en-Bresse. C’est là que Bergevin est venu me rechercher un soir de 1972, pour me convaincre de m’installer comme artisan avec lui. Je me suis donc retrouvé en banlieue parisienne. Nous venions souvent à Boulle voir Mignot, nous avions bien besoin de ses conseils, de ses encouragements. Pensez donc nous n’avions que 25 ans et encore tant à apprendre !
Je me souviens d’un de ses conseils : “Lorsqu’on vous propose de faire tel ou tel travail, vous dites d’abord oui, et vous réfléchissez après” !
C’est comme ça que nous avons été formés, y compris en nous engageant dans des chantiers absolument incroyables tel le tableau de bord de la GS-Citroën… Nous n’avons jamais regretté d’avoir écouté ce conseil.
En 1977, je suis entré à la Monnaie de Paris, alors que Bergevin abandonnait malheureusement le métier. J’ai continué à aller à Boulle de temps en temps. Et puis Mignot est parti à la retraite, et je ne me suis plus trop senti chez moi à l’atelier, alors je n’y suis plus retourné.
J’ai un seul regret (je n’ose pas dire reproche), c’est qu’il ne soit jamais venu me voir une fois que je suis rentré à la Monnaie de Paris, ni seul, ni avec ses élèves. Je n’ai jamais su pourquoi !
J’ai appris par Élisabeth Cordier, restée très proche de lui, qu’il était malade. Son décès en septembre 2009 a été un véritable coup de marteau. Ce n’est pas un simple mot de dire que Monsieur Mignot est un des personnages qui a compté dans ma vie, depuis 1963 jusqu’à aujourd’hui. Merci, Nicolas, de lui rendre cet hommage !
Caricature de Pierre Mignot par Jean-Luc Maréchal. Les élèves tiraient le portrait des profs en lien avec des affiches de l’époque… Ici car Pierre Mignot tout en saluant chaque élève regardait sa montre… “En retard Maréchal”…
Yvan HIOT, élève graveur en modelé de 1984 à 1989, promotion 98.
yvan.hiot@gmail.com – 07 62 24 11 83
Yvan HIOT, le roi du chalumeau… Pour être joli et photogénique le photographe a demandé de grandes flammes… Et alors, tu sais pas régler ton chalumeau ? Les saucisses sont pas prêtes d’être cuites…
Photo “Jours de France” pour le centenaire de l’école BOULLE.
Se rappelle une phrase de Pierre Mignot : “Mesdemoiselles, n’épousez jamais un joueur, un buveur ou un feignant”. Voici mes propres souvenirs de Pierre Mignot.
Élisabeth PECTORIN (CORDIER), élève graveur en modelé de 1972 à 1976, promotion 86.
Maître graveur de la Monnaie de Paris aujourd’hui à la retraite – zabichon@gmail.com
Comme tous et toutes à l’époque, avant de commencer notre cursus à l’école Boulle, on prenait connaissance des différents ateliers qui existaient au sein de l’école, pour après, faire notre choix et opter pour l’un d’entre eux.
L’atelier de gravure sur acier (nommé aujourd’hui gravure en modelé) m’a particulièrement séduite, et là, je pense que Mr. Mignot est à l’origine de mon choix ; c’était un professeur de grandes qualités, tant sur le plan professionnel que pour le genre humain, un « passionné de la vie » ; il avait l’art et la manière de nous exposer les choses, de nous donner envie de créer et de réaliser de beaux projets dans ce métal, l’acier, qui est fascinant à graver. J’ai eu la chance d’être accueilli dans son atelier et je me suis donnée à fond dans cette spécialité, en ayant comme objectif d’en faire mon métier.
Suite à cette formation, j’ai travaillé quelques années dans le privé, et très vite, j’ai passé le concours pour entrer à la Monnaie de Paris, sur les conseils de M. Mignot. Heureuse, d’avoir été la première femme graveur à entrer dans l’atelier de gravure de la Monnaie de Paris. Fier d’une très belle carrière, je n’ai jamais regretté ce choix, et je peux dire :
« Merci M. Mignot ».
Cyrille CONRAD, élève graveur en modelé de 1977 à 1982, promotion 91.
Ma dernière année, je la faisais en tant que 5ème année d’atelier et je partageais mon temps avec des cours le matin à l’école des Beaux-Arts dans l’atelier de gravure en Médaille de M. Asselberg. C’est là, que j’ai fais connaissance avec Elisabeth CORDIER et Yves SAMPO (graveurs de la Monnaie).
Le listing des promotions m’a permis de retrouver « d’anciens collègues », si je puis dire, ils étaient de la promotion 55 en 1941.
Je travaillais tous les étés pour la Maison Historex qui employait Jacques Fualdes, Pierre Coathual, et Pierre Delhomme et c’est en les voyant travailler que j’ai voulu entrer à l’école Boulle et spécialement en Gravure sur Acier avec Pierre Mignot.
En lisant le témoignage de M. Guenot, il m’est revenu une anecdote concernant M. Mignot, notre professeur de gravure sur acier et M. Macardier, Meilleur Ouvrier de France et professeur de tournage, l’atelier voisin de la gravure au rez de chaussé.
Macardier avait besoin de faire couper une barre de laiton. M. Mignot me demandait de m’en charger. Les deux professeurs étaient autour de moi pendant la manœuvre lorsque M. Macardier me dit lors du serrage de la barre : “serre autant que tu es bête”, formule de plaisanterie facile à laquelle, je ne répondis pas. Bien entendu la corpulence et la prestance de M. Marcardier était impressionnante. Mais M. Mignot intervient promptement toujours prêt à défendre ses élèves, il dit : “Alors, tu ferais mieux de le faire toi même ce sera mieux serré”. Je ne sais pas si cette anecdote peut être relaté mais pour moi, elle montre également le caractère vif de M. Mignot.
Pour finir voici les noms de mes camarades de promotion : Béatrice Berr, Raymond Sarti, Chantal Schneider (décédée) et Bernard Joisseau.
Alice de PARSEVAL, élève graveur en modelé de 1987 à 1991, promotion 101.
alicedeparseval@gmail.com – 06 31 60 17 77
15 Mai 1987, j’ai 15 ans et pars vers la rue Pierre Bourdan pour passer le concours de l’école Boulle. J’étais alors élève dans une école privée à Paris, portant l’uniforme et suivant un enseignement stricte et catholique ou j’étais forcée de rester jusqu’au baccalauréat. Entêtée et déterminée j’ai désobéi et je me suis inscrite au concours de l’école Boulle.
Cette école avait hanté mon esprit depuis les portes ouvertes, des ateliers à tous les étages, des oeuvres d’art sur tous les murs, des odeurs de bois, de vernis, de peinture… Tout ce que j’aimais et surtout il y avait plein de jeunes passionnés.
Fin Juin un courrier de l’école Boulle m’annonce ma réussite au concours et donc mon inscription. Avec une émotion indescriptible je réalise à quel point ma vie s’engage pour un grand virage.
En Septembre, c’est la rentrée des classes tant attendue, nous sommes des « Arpettes » et allons visiter les 12 ateliers de l’école pour faire notre choix de spécialité. Je voulais faire de la sculpture sur bois ou un métier en rapport avec la joaillerie. Mais j’ai eu un enthousiasme pour l’atelier de gravure en modelé et j’ai été particulièrement séduite par le professeur. Je me souviens avoir dit à mes parents : « Cet homme va m’apprendre bien plus qu’un métier ». Ce petit professeur à l’allure impeccable, au regard froid et déterminé faisant peur à certain mais certainement pas à moi. On nous avait dit lors de la visite : « surtout ne choisissez pas l’atelier parce que vous aimez le prof ». Cette phrase me revient et me fait sourir encore aujourd’hui, j’ai souri intérieurement car j’allais faire exactement le contraire.
« Monsieur Mignot » ce nom résonnera toujours en moi et dans mon esprit. Il était un père pour nous tous. Peut-être parce que malheureusement, il n’a jamais eu d’enfants à son grand regret. Monsieur Mignot se fâchait, il était dur mais juste, il détestait la médiocrité et son perfectionnisme nous a donné à tous les meilleurs bases de ce métier d’art.
Je me souviens qu’il nous disait: « Quand on est graveur en modelé, on sait tout faire. »
J’ai passé 5 années à ses côtés et ayant été lauréate du concours d’entrée, j’ai pu également suivre les cours de sculpture sur bois en cours du soir et le samedi, ce qui m’a permis d’obtenir 2 DMA (diplômes des métiers d’Art, dans ces spécialités). Pierre Mignot est parti à la retraite lors de ma dernière année. J’ai continué à le voir jusqu’à mon départ aux Etats-Unis en 1997, puis nous avons gardé contact par courrier. Ses lettres étaient émouvantes, pleines de conseils et de tendresse. Il avait la chance d’être accompagné d’une admirable épouse. Il me racontait ces magnifiques voyages.
C’est avec beaucoup de tristesse que j’ai appris son décès, une belle personne venait de nous quitter.
Je suis heureuse de voir que beaucoup l’appréciait, cet hommage lui est mérité.
Depuis 25 ans, j’ai toujours travaillé dans le design et le développement de pièces de haute joaillerie, d’horlogerie et de produits de luxes. Aujourd’hui, je suis directrice artistique d’un groupe Suisse à Genève. Je dois ma carrière… beaucoup à Pierre Mignot. J’ai gardé quelques réalisations de pièces de gravure et surtout mes outils fait à la main un par un selon les instructions méthodiques et rigoureuses d’une précision horlogère de notre Monsieur Mignot… Ils ont un peu pris la rouille mais ils me rappellent l’école Boulle. Aujourd’hui j’ai la chance de travailler en collaboration avec les métiers d’arts en particulier les graveurs, joailliers et sertisseurs. C’est toujours avec beaucoup d’émotions que je vois les établis à cette forme arrondie, les burins et les échoppes affûtées, les multiples ciselets, l’odeur du ciment ou de la pâte à polir. J’utilise tous les jours un pied à coulisse, un compas d’épaisseur et j’ai un respect sans mesure pour toutes ces personnes aux doigts noircis, aux mains usées qui nous réalisent les plus belles œuvres de nos métiers d’arts.
Photos prisent en Juin 1991 pour le départ en retraite de Pierre Mignot, moment convivial et surprise, organisé par les élèves à l’école. Photos d’Alice de Parseval – merci. En fond : Johann MERIOT, Alice de PARSEVAL, Pierre MIGNOT, et Céline DOLET (si je ne me trompe pas).
Isabelle PROTAT, élève graveur en modelé de 1979 à 1982, promotion 93.
Acceptée en 1979 à Boulle, j’en suis partie en 1982, avec un cap de gravure en modelé : trop d’investissement pour moi, à l’époque où je ne rêvais que de quitter Paris et de voyager… 44H par semaine, plus les nuits de travail sur des dossiers à rendre, j’ai laché et ai quitté Paris avec mon CAP en poche. Je me souviens qu’on s’était battu à l’époque pour que tous les ateliers accèdent à un BT puisque nous avions tous le même tronc commun mais ce n’était réservé qu’à certains ateliers…
Quand on m’a annoncé en 1979 qu’il n’y avait plus de place en « gravure bijoux », on m’a proposé à la place : Tapisserie, tournage ou Gravure acier. J’ai choisi Gravure acier et me suis retrouvée la seule fille de ma promotion avec Mr Mignot. On n’était pas bien nombreuses à l’époque dans cet atelier ! Je soupçonne Mr Mignot de nous avoir particulièrement bichonnées, protégées et aidées pour cette raison. Il n’aimait pas quand les « grands » de l’atelier nous disaient d’aller demander un trusquin à roulette ou une lime à épaissir à l’intendance dès les premiers jours d’atelier !
C’était un très bon enseignant et par ailleurs un homme généreux, une belle âme…
J’ai voyagé, puis travaillé dans la sérigraphie, puis pleins de boulots différents et ce n’est que bien plus tard en 1992 que je suis revenue à mes premières passions. J’ai été autodidacte en bijouterie à l’aide de bouquins, de patience et avec quelques conseils de temps en temps d’un bijoutier quand je ratais mes soudures. J’ai ensuite suivi les ateliers de Fontblanche à Nîmes (peinture, sculpture et bijou contemporain) et je me suis installée à mon compte dans la création de bijoux Argent et pierres, et ce, pendant 15 ans, jusqu’à des tendinites continues trop difficiles à gérer à un établi.
L’école Boulle m’a marqué, positivement. L’amour du travail bien fait, je sais d’où cela me vient…
Je suis maintenant une nouvelle route et garde de très bons souvenirs de cette période et de certains de mes professeurs ou amis, dont Pierre Mignot bien sur. J’ai été très peinée de sa disparition, apprise à l’époque par des anciens de Boulle avec qui je suis restée en contact.
Baudouin COLIGNON, élève graveur en modelé de 1967 à 1971, promotion 81.
Peintre, graveur, plasticien. Étudiant à l’ENSET, département « Arts et Création industrielle » de sept 1972 à juin 1976 ; à l’école BOULLE, Professeur d’Arts appliqués de sept 1976 à juin 1992, puis Chef de travaux de sept 1992 à juin 1996 ; Directeur et coDirecteur du département « Design » à L’Ens de Cachan de sept 1996 à juin 2013. contact@baudouincolignon.com
Texte en hommage à Pierre Mignot
Je suis rentré à l’école Boulle en septembre 1967 et à l’atelier de gravure acier fin décembre, je crois. À cette époque le roulement durait 3 mois, et nous passions une semaine à réaliser une pièce dans chaque atelier. J’ai compris très vite dans cet atelier au-delà de son apparence un peu rude, que nous pouvions apprendre à faire beaucoup de choses. Beaucoup d’outillages, assez différents et l’idée de travailler au second degré c’est à dire de réaliser des matrices qui produisent des pièces, m’est apparu très riche. Je n’avais pas encore compris que l’exercice mental qui consiste à dessiner et à modeler à l’envers a des conséquences, au plan de la formation, indélébiles. Ce qu’on apprend à jouer à ces jeux, ne peut jamais s’oublier. Un vrai acquis.
Au plan pédagogique, pour l’apprentissage d’un métier aussi complet et difficile, la conduite du travail avec Pierre Mignot était évidente. D’abord ses explications, ses demandes et consignes étaient toujours très claires. Ensuite il attendait de la part de l’élève un engagement intelligent et constant, ce qui n’était pas facile pour tous. Mais il faut dire qu’on savait la parole de cet homme sans biais, sans arrangements, dans une droiture totale. Une vraie confiance naissait progressivement, exécutant de gestes techniques au milieu de machines parfois délicates à manier. Je crois d’ailleurs que j’ai développé à cette époque un sens de la sécurité qui m’a beaucoup protégé par la suite et nous nous attachions tous à réaliser les demandes de notre professeur, avec la qualité optimum que chacun pouvait produire. Cette construction pédagogique irriguait les autres domaines, car elle nous rendait tous beaucoup plus responsables et passionnés que nous ne l’étions à l’entrée dans l’atelier. C’était une vraie formation et dans cette séquence de notre vie, un vrai maître.
À dire ainsi notre vie d’atelier, on peut croire à un univers difficile, exigeant et simplement rigide.
En fait non, car tout cela était empreint d’une grande humanité et cet homme laissait à l’élève prendre un temps personnel et intérieur pour arriver au meilleur de lui même. Nous avons tous connu ses qualités humaines – droiture, respect, courage et grande probité – aussi celles de l’enseignant, chargées d’un vrai sens responsable du devoir de la transmission.
Mais je ne résiste pas pour aller au-delà des louanges, au récit d’un épisode qui révèle encore mieux l’homme derrière le professeur.
Tailler des pointes de diamant était un exercice assez basique dans l’atelier, mais qui préfigurait déjà les difficultés à surmonter par la suite. Le travail se propose comme un exercice frôlant l’impossible, car pour terminer la taille des quatre côtés de surfaces identiques formant une pointe au centre géométrique du volume, il ne faut pas donner quand on s’approche de la fin, le coup de burin de trop ! Savoir s’arrêter à temps dans une maîtrise parfaite des derniers gestes. La pédagogie en cours était souvent celle de la reproduction et nous trouvions triste de ne pas pouvoir inventer plus de motifs nouveaux tout en intégrant les difficultés techniques attendues.
Et c’est à l’occasion d’un échange de cette nature entre création et technique que ma promotion s’est permis de demander un aménagement à la pédagogie du maître ! Nous étions au début de la quatrième année en pleine phase de mise au point de nos deux pièces de diplôme. Le débat était intellectuellement profond, ce qui devait remuer beaucoup de choses, et Pierre Mignot l’a bien vite compris. Je cite ce moment, car c’est dans ce genre de dépassement qu’on se rend compte de la vraie valeur des hommes. Quand tout va bien, il n’y a pas de problème et la vie apporte peu d’enseignement. Mais que des étudiants en viennent durant quelques semaines à remettre en cause leur apprentissage dans un tel atelier avec un professeur aussi rigoureux et honnête que lui, c’est que la question est profonde. J’ai pu découvrir à cette occasion le vrai questionnement intérieur de notre professeur, qui avec écoute, calme et recul avait su patiemment faire comprendre l’essentiel aux passionnés un peu agités que nous étions à l’époque. Tout cela avec l’aide et sous le regard bienveillant et humaniste de Paul Beucher, sans aucun doute pour moi un des plus grands directeurs de l’école Boulle.
Quand je suis devenu Chef des travaux, 25 ans plus tard, lors du pot de fin d’année, Pierre Mignot apprenant la nouvelle de ma nomination récente est venu, dans une franchise totale, me féliciter et m’encourager. Cela m’a touché et je m’en souviens. Nous avions une relation faite d’un profond respect mutuel, lui savait mieux que personne mes années de formation et mon comportement face au travail. Je pense qu’au plan technique, j’ai tout absorbé et assimilé de ses conseils. Comme une éponge, sans discuter. Cela m’a donné dans ma vie et mes autres pratiques professionnelles ultérieures une assise technique et technologique dont je le remercie.
Laurent DÉTRÉE, élève graveur en modelé de 1987 à 1990, promotion 101.
Cadet d’une fratrie de trois enfants (deux filles et un garçon), j’ai passé une grande partie de mon enfance et adolescence dans un cadre rural très agréable, au beau milieu d’une petite commune de 1000 habitants des bords de Loire. Du haut de ma fenêtre, je me prêtais souvent à contempler cette campagne inspirante mais rude, l’éducation y était stricte, parfois sévère. Mon parcours scolaire fut difficile, tourmenté, passant ainsi du public au privé, je m’accrochais toutefois.
Dans ma bulle, je m’évadais alors dans le dessin, la peinture, la lecture. Grand, je me voyais pâtissier confiseur, rêvais à ma façon de conquérir l’Amérique. Ne trouvant pas de contrat d’apprentissage dans ce métier, il me fallait rebondir, mais de quelle façon !
Nous nous rendions souvent, durant les périodes de congés scolaires retrouver avec un grand bonheur notre grand-tante italienne Paulette et son mari Jacquie, nous savions d’avance que nous allions encore pouvoir nous enrichir de sa passion pour l’Italie, les Arts, les enfants, la vie, découvrir Paris. C’est à son initiative qu’il m’a été permis de tenter le concours d’entrée à l’école Boulle (je ne savais même pas que ce genre d’école pouvait exister), actant ainsi le point de départ d’une belle aventure.
Je ne me destinais pas, par évidence ou du fait d’un parcours plutôt classique, à rejoindre un jour les bancs de cette école, je réussis toutefois le concours d’entrée en 1987. Je partage aujourd’hui des souvenirs communs, plus personnels, parfois confus, mais qui viendront corroborer cette pensée commune que nous avons de Pierre Mignot, un être extraordinaire enclin d’une grande humanité.
C’est un parcours initiatique qui nous fit découvrir l’école, les disciplines et métiers proposés, les ateliers. Il nous fallait faire un choix, exprimer nos choix et vœux, difficile était la tâche. Je n’ai pas l’exactitude de ces choix, toutefois je me souviens clairement vouloir prioriser mon intégration dans l’atelier de sculpture sur bois. Il fut acté que j’intégrerais l’atelier de Pierre Mignot consacré à la gravure en modelé. Outre les difficultés rencontrées (l’éloignement des proches et de la famille, la mobilité, le logement, l’investissement général que cela pouvait représenter), nous étions accompagnés de nos aînés et parrains désignés, les 4ème années, portés par un élan et cette volonté de partager des valeurs et cette volonté de réussite. Pierre Mignot était l’un d’entre eux, entier, unique, passionné, portant et partageant sa connaissance et son expérience du métier et bien plus encore à celles et ceux qui partageaient ces instants d’apprentissage, sa famille. Je ne le savais pas sans enfant, malade, lui comme d’autres éléments forts et emblématiques de cette école, ils n’exprimaient pas assurément leurs émotions, tout était dans le regard, ce regard bleu clair si intense qui me tétanisait parfois, quand il était arrivé pour nous l’heure de le rejoindre à son bureau imposant, planté là devant cette presse encore plus impressionnante, c’était pour moi et les autres de mes camarades le moment de lui montrer nos connaissances sur les aciers, les pratiques de façonnage et d’affûtage de nos outils. Certes il ne supportait pas la médiocrité, l’échec, il nous faisait entendre et comprendre à sa manière qu’il nous était possible d’atteindre, dépasser nos limites et nos craintes, de tendre vers la réussite et l’excellence de l’exercice, le travail de nos aînés, visible de toutes et tous servaient également cette cause. Au même titre, je m’amusais dès que le pouvais et en silence (peur de déranger), à rendre visite et découvrir le travail et les pratiques des autres ateliers (sculpture, gravure ornementales, monture en bronze, ébénisterie, menuiserie, menuiserie en siège, tapisserie), là ou tous partageaient cette même passion des métiers et de l’apprentissage.
Je ne suis resté que trois années auprès de Pierre Mignot, des choix de vie m’ayant amenés par la suite à m’orienter sur une autre discipline, l’architecture d’intérieure. Je reste parfois nostalgique de cette période de ma vie riche et qui a d’une certaine façon, fait l’homme que je suis aujourd’hui (on retrouvera notamment chez moi une certaine sensibilité, cette soif de rigueur, un amour assumé pour celles et ceux qui perdurent dans la pratique des métiers d’Art). J’exprimerai un regret, celui de n’avoir pu finalement échanger plus librement et sur le terme de la vision qu’il pouvait avoir de nous-même, exprimait-il une grande fierté au travers de ce que nous puissions lui rendre ? Il est étonnant de voir que mes souvenirs sur l’atelier restent entiers. Il était à l’image de l’Homme, constitué et organisé dans une logique implacable, avec fière allure. Deux accès permettaient de se rendre à l’atelier, situé au rez-de-chaussée et en contrebas de la rue Pierre Bourdan, les établis fièrement alignés et noyés de cette lumière naturelle nous permettaient de voir ou d’être vus des passants, les machines derrière nous s’associaient à des tâches spécifiques et hiérarchisées (forge, meules à eau, ponceuses à bandes verticales et horizontales, raboteuses et surfaceuses, pantographe, machine à électro érosion et presses), des vitrines sublimées des ouvrages de chacun.
Nous nous amusions parfois jusqu’à la chamaillerie avec nos voisins, les tourneurs d’art avec qui nous partagions l’espace et le respect inculqué de nos maîtres.
Oui, nous étions tous respectueux les uns des autres, des outils et des machines mis à notre disposition durant des décennies. Le vendredi après-midi était en partie consacré au nettoyage de l’atelier, des machines, le moment pour moi de rejoindre la Gare de Lyon, de retrouver mes proches.
Pierre nous prodiguait toujours des conseils avisés, sur la technique, la sécurité (*les filles, il vous faut attacher vos cheveux longs devant le tank à poncer, en souvenir d’une jeune fille à qui il avait évité de justesse de se voir arracher entièrement la chevelure…), je me souviens également et à l’occasion de ce voyage programmé pour la Réunion (jumelage de l’école), qu’il nous avait montré avec une grande fierté ces objets fabriqués de ses mains (pièces automobiles pour son véhicule, vêtements, sacoche pour appareils photo…).
En effet, il savait tout faire de ses mains, jusqu’à la prouesse de pouvoir tirer, graver des lignes parallèles au 1/10ème de mm !
Cette confiance, il me l’a donnée le jour ou avec tout son appui, son assistance et ses encouragements, je me suis vu confier la réalisation de mon unique médaille en vue de la 22ème olympiade de la chimie et dont les tirages devaient être proposés aux visiteurs lors des journées portes ouvertes. Je garde toujours près de moi cette médaille, avec une certaine fierté.
Pour tout cela Pierre, merci ! Merci pour la richesse de ces trois années passées en votre compagnie.
Jean-Pierre CHABENET, élève graveur en modelé de 1979 à 1983, promotion 93.
Quand je suis arrivé à l’école Boulle, mon premier choix était l’atelier de gravure sur acier. Car j’aimais faire des maquettes en plastique d’avions et de bateaux. Ainsi, je pensais que j’allais pouvoir en créer moi-même. Mais avec moi, monsieur Mignot a eut fort à faire.
Il doit être agréable d’appeler les parents pour leur dire : « madame, monsieur, votre enfant ira loin, c’est un surdoué ». Hélas dans mon cas ce fut plutôt le contraire. D’emblée je m’illustrais par une maladresse peu ordinaire. Je n’avais que 16 ans, il n’était peut-être pas trop tard. Un dialogue s’engagea avec ma mère car monsieur Mignot voulait être sûr que je ne faisais pas une erreur. Pourtant, je ne savais pas où aller étant médiocre en tout. Donc je suis resté à l’école Boulle et en gravure sur acier. Au début ça aurait pu mal tourner, car d’autres élèves ne comprenaient pas ma présence parmi eux alors que je brillais par un tel manque de talent. Je me dis que discrètement, il dut intervenir pour les ramener à plus de sollicitude.
Et puis, je me suis appliqué. Monsieur Mignot encourageait ma persévérance. Il la citait en exemple, en soulignant mes progrès. Je me souviens qu’une fois, en modelage, le professeur nous avait donné un sujet libre. Comme, j’étais fier de lui montrer ma création, tout dans le goût d’une certaine modernité. J’étais dupe. Pas lui. Il sermonna le professeur en lui disant que c’était scandaleux de donner des illusions (d’être de grands artistes à des personnes qui n’en avaient pas le talent et qui même à force de travail ne pourraient jamais atteindre qu’à une honnête médiocrité). J’aimerais donc souligner ce choix qu’il faisait de la vérité.
Une fois, on parlait de musique. Je lui ai dit que j’aimais Vivaldi. Il m’a répondu que Vivaldi, c’était bien, que c’était léger. Je me souviens d’un autre moment, je devais affûter une fraise. Hélas mon manque d’intelligence m’avait empêché de comprendre tous les délicats réglages qu’il fallait effectuer sur l’affûteuse. Je me trompais, et me re-trompais encore. Quelle angoisse j’éprouvais que ça ne se voie pas. En fait, j’étais en sueur sous ma blouse bleue de graveur. Je le voyais bien passer puis repasser. Sans doute qu’il se doutait que quelque chose clochait. Mais je n’osais pas l’appeler.
Je me souviens aussi qu’un jour il m’a dit, « vous êtes amoureux, Chabanet ! » pour expliquer toutes mes maladresses. Effectivement, oui, j’étais amoureux. Naturellement ce n’était pas réciproque. Et ce ne fut peut-être pas une mince affaire pour lui de gérer la situation qui en résultait. Quoiqu’il en soit ce n’est pas pour cela que j’avais du mal, puisque de toute façon, amoureux ou pas, dans toute la suite, quoique je fasse, j’en aurai toujours autant.
Pourtant malgré tout, j’ai été admis en quatrième année. J’ai appris que je le devais à ses efforts. Il avait tant insisté que malgré l’avis contraire sans doute de tous les autres professeurs, le conseil de classe avait fini par céder et par m’admettre en quatrième année. Mais j’avais le cœur ailleurs. J’avais commencé le latin. Je croyais que les études de lettres étaient ma destinée. Et ainsi j’ai quitté l’école Boulle sans dire au-revoir à personne et même en laissant toutes mes affaires de gravure dans l’atelier. Monsieur Mignot eut donc la tâche ingrate d’avoir tout à débarrasser lui-même. Tant d’efforts pour si peu de fruits. Sans doute aurait-il pu téléphoner à ma mère pour qu’elle vienne tout récupérer. Il ne l’a pas fait.
Que me reste-t-il de ces années ? Un bloc d’acier avec une rosace. Un plâtre tiré à partir d’un masque modelé en plastiline. Deux plaques émaillées représentant un motif qui devait nous ressembler. Le souvenir d’un pèlerinage à Chartres auquel m’avait invité un Grand, Vincent Bourgoin. Un portrait de style mésopotamien embouti à la grande presse par un autre Grand : Cyrille Conrad. J’en garde aussi l’expérience concrète de la forge, du chalumeau, des outils chauffés au rouge pour les frapper au marteau et puis la trempe dans l’eau ou dans l’huile. J’ai quand même réussi à créer une maquette de galère romaine, d’autres de ballons dirigeables. Mais en tant qu’amateur, le papier a remplacé le plastique et les matrices sont devenues des fichiers informatiques. Sans doute que j’aimerais en faire d’autres. Mais je n’ai pas de place dans mon logement et, avouons-le, pas, non plus, de débouchés extérieurs. Ainsi prions, monsieur Mignot, de demander à Dieu, qu’il voit peut-être, de m’éclairer enfin sur ma vocation. Car s’il existe un Au-delà où la bonté ait quelque droit de cité, qui sait si son intercession ne pourra encore m’aider aujourd’hui !
Après l’école Boulle, je me suis donc orienté vers des études de lettres. J’ai réussi in extremis le baccalauréat A1, passé la licence, la maîtrise et le DEA de Lettres modernes. J’ai même tenté d’être professeur de lettres, mais des faiblesses dans la discipline jointe à des difficultés avec les élèves ont entraîné mon licenciement. Par chance j’ai pu entrer à France Télécom comme fonctionnaire. J’ai tenté des études de biologie sur mon temps libre dans l’espoir de trouver des médicaments qui nous rendent plus beaux, plus jeunes, plus intelligents. Mais hélas, il me faut déjà surmonter les étroites limites de ma médiocrité ne serait-ce que pour comprendre le moindre paragraphe des manuels. Mais enfin, je persévère.
Guilhem CHARRON – élève graveur en modelé de 1988 à 1990, promotion 102.
Guilhemcharron@gmail.com – 06 30 34 81 26
J’ai choisi la gravure en modelé car la visite de l’atelier m’avait impressionné avec ses nombreuses machines et son soucis du détails dans le travail à effectuer. Pour être honnête M. Mignot m’a apporté toutes les bases de mon travail actuel c’est à dire la rigueur et la précision même si je ne travaille plus dans la gravure, ces valeurs restent universelles pour moi. En réfléchissant, je suis sorti en 90 et je n’ai fait que 2 ans dans l’atelier en sortant avec mon diplôme de DMA + CAP car je me suis orienté en BTS par la suite. C’est vrai que ces derniers temps je me demandais ce que devenait M. Mignot et j’ai toujours cette envie de retourner voir l’atelier pour me rappeler mes débuts dans le grand Art.
Promis j’irai aux portes ouvertes cette année !
Thomas LACROIX – élève graveur en modelé de 1990 à 1995, promotion 104.
Joaillier à Inverness, Ecosse. trinaclacroix@hotmail.com – Site web
Premiers jours, premières visites par petits groupes des ateliers de l’école pour élaborer une liste préférentielle des ateliers de son choix.
Nous sommes entrés dans ce long atelier de gravure en modelé ; d’un côté les machines, de l’autres les établis accolés le long de la baie vitrée ; tout au fond au pied d’une énorme presse Monsieur Mignot nous attendait à son vaste bureau. Il était vêtu d’une blouse de travail dont le col lui entourait le cou, lui donnant l’allure d’un chirurgien.
Puis il parla de façon engagée, quand l’humanité grava dans la pierre pour y laisser la trace de son passage et de son art ; puis du sol, y extraire les minerais et l’acier… ses yeux clairs, bleu perçant et son regard enthousiaste appuyaient calmement son discours. Avec engouement il nous communiqua en peu de temps sa relation avec le métal.
Je me surpris à mettre la gravure acier en tête de ma liste car je ne m’attendais pas à apprendre l’acier avant de mettre les pieds à l’école Boulle; et mon choix fut exaucé. Aujourd’hui avec réflexion et sans regret, Monsieur Mignot fut le meilleur des débuts de mon apprentissage.
Il nous transmettait sa compréhension du métal. Nous apprenions tout du début, à confectionner notre outillage (ce qui épate encore aujourd’hui beaucoup de mes collègues en Grande-Bretagne), d’amadouer les machines des plus simples aux plus complexes.
Nous avions trois ans pour faire le tour du métier et son enseignement était juste et sans bousculades. Quelquefois nous faisions des erreurs et cela était une bonne opportunité d’apprentissage… pour tout le monde!
Monsieur Mignot attroupait les élèves qu’il voulait autour de la situation afin que l’on en prenne de la graine :
« Alors là, vous voyez! Monsieur Lacroix a fait une erreur de calcule dans sa mise au point. Et c’est pourquoi l’étau-limeur est entré en collision avec la matrice par 1 cm d’épaisseur d’acier… maintenant je vous remontre comment il fallait faire… »
L’élève pouvait rougir mais en général le groupe était solidaire et Monsieur Mignot le voulait bien. Il n’y avait pas de ‘mauvaise’ malice.
Je me souviens d’un élève qui avait coincé sa lame de scie dans un moule encore trop chaud. Monsieur Mignot est arrivé à son secours mais avec peine. Alors il fixa son élève et lui demanda amusé: « Etes-vous amoureux ? »
Monsieur Mignot était dévoué dans toutes entreprises et nous recommandait « dans tout ce que vous faites, mettez-y de la passion ! Vous comprenez bien ? De la passion ! » Il nous le disait avec ce charisme caractéristique à lui-même. Il finissait: « Sans passion, à quoi bon ! ça n’est même pas la peine de commencer ! ».
Monsieur Mignot était précis et le voulait ainsi pour ses élèves. Nos travaux devaient être beaux sous tous leurs angles. « Ce n’est pas parce que mes pieds sont cachés par mes chaussettes et chaussures que je ne les lave pas. Donc même si l’envers de votre travail et des détails ne se voient pas, il faut en prendre soin et leur donner un beau fini ».
Cette quête du fini me poursuit encore aujourd’hui, mais ne me hante pas.
Nous changions d’ère et Monsieur Mignot était à cheval entre deux. Il nous prévenait de certains qui pourraient nous attribuer la mauvaise image du “manuel”; or un manuel use de toute son intelligence et de dextérité pour accomplir son travail.
Une dernière anecdote en tête avait arrondi l’image très, trop sérieuse, voire perfectionniste du personnage. Monsieur Mignot nous avait raconté une drôle d’expérience dans un port de pêcheurs. Il photographiait les filets, les pièges, les cordages, jusqu’au moment où il fut invité à bord du bateau d’un pêcheur. Celui-ci l’invita à boire de l’eau-de-vie, et bien vite le pêcheur lui affirma que c’était de tradition de s’asperger ses vêtement d’alcool lorsque l’on passait un bon moment. Au retour sa femme lui indiqua la salle-de-bain sans mot dire…
Je n’ai eu Monsieur Mignot que très peu de temps considérant mon cursus, mais il a réussi à toucher mon cœur et mon savoir-faire ; afin que j’en use dans mon métier. Merci, Pierre.
Jean-Yves THÉBAULT, élève graveur de 1965 à 1969, promotion 79.
Maître graveur de la Monnaie de Paris aujourd’hui à la retraite – 3, allée du Landry -35000 Rennes
Le témoignage de Jean-Yves THEBAULT ne m’est pas arrivé par mail mais par courrier postal… Un courrier qui a mi du temps à arriver car les machines n’ont pas l’habitude de décrypter une belle écriture anglaise. Merci. J’ai donc retapé l’ensemble de son texte mais pas en cursive.
Souvenir d’un tailleur d’acier.
Nous sommes en 1963, je viens d’échouer lamentablement à ma première partie de Baccalauréat, aussi, l’année suivante, je prends des cours de dessin le samedi à l’école Boulle sous la direction de Monsieur Chanson, afin de passer les épreuves préparatoires à l’entrée de cette prestigieuse école (mon niveau de culture générale m’ayant dispensé des épreuves écrites). Une fois reçu, à la rentrée de septembre 1965, nous effectuions alors un stage de deux semaines dans chaque atelier (tournage d’art, ébénisterie, monteur en sièges, sculpture, ciselure, tapisserie, monteur en bronze, gravure cristal, bijouterie et gravure sur acier). À la fin de ces divers stages, nous étions notés ; la répartition des élèves se faisait en fonction de la note obtenue et du choix émis par chacun d’entre nous.
Les ateliers du métal étaient les moins demandés ; mon choix fut respecté puisque j’arrivais dans l’atelier de gravure sur acier dont le professeur m’avait fait forte impression lors du stage, par la chaleureuse gentillesse de son accueil et en nous dévoilant par de brillantes explications ce futur métier. Dès lors, je suis pris sous le charme envoûtant de ce maître du savoir pour qui j’avais le plus profond respect. Dès le début, ayant sans doute deviné en moi la passion du rangement, du classement et de l’organisation, je l’assistais dans la réorganisation complète de l’atelier : implantation des machines, création d’une nouvelle forge, classement de tout l’outillage dans des armoires, mise en place des vitrines dans les piliers qui nous séparaient de l’atelier de tournage dirigé par Monsieur Macardier, son grand Ami (j’aurais d’ailleurs l’occasion, un peu plus tard d’y effectuer un stage). Un des recoins de l’atelier était encombré par une quantité invraisemblable de matrices, de poinçons, d’ébauches de gravure datant des années passées : je le secondais dans ce travail pharaonique qui consistait à ne conserver que les plus belles réalisations, afin d’orner les plus belles vitrines de l’atelier ; soudain je tombe sur une plaque d’acier pour gaufrage qui représentait les armoiries impériales. Le soir, au moment de partir, il me fit cadeau de cette plaque, connaissant ma passion pour le premier Empire ; ce cadeau trône aujourd’hui dans une de mes vitrines, fidèlement gardée par mes petits soldats de plomb.
Ses explications sur l’affûtage des fraises, l’utilisation du pantographe, de la fraiseuse me fascinaient ; je n’avais qu’une hâte, c’était de les utiliser. Conjointement à l’apprentissage de la gravure, chaque vendredi nous constituions un cahier de technologie, agrémenté par ses fiches claires, nettes et précises, quant à tout ce qui concerne l’acier et son utilisation sous toutes ses formes ; (forgeage des burins, trempe, aciers spéciaux, affûtage des forêts, perçage, tournage, dressage d’un bloc à l’étau limeur, etc.).
Dès que notre habileté à manier le burin et l’échoppe s’affirma, nous devions avant chaque exercice présenter un rendu sous forme d’un dessin en couleurs de ce que serait l’objet obtenu par estampage sur la matrice qui devait naître de nos mains. J’ai toujours ces quatre classeurs de technologie dans ma bibliothèque et je ne peux les regarder sans penser profondément à la richesse de son enseignement, à ses conseils toujours pertinents, à sa poignée de main à la fois ferme et chaleureuse, à ce regard bleu acier à la fois pénétrant et si plein de bienveillance.
Les quatre premières années s’écoulent très vite, avec en 1968 le passage du C.A.P. (alors que dehors grondaient les étudiants). Puis 1969 le diplôme tant convoité, symbole de notre formation. Monsieur Mignot convainquît alors mes parents pour que je puisse effectuer une cinquième année à Boulle, mais j’avais 23 ans et des obligations militaires à remplir ; grâce à la complicité du directeur Monsieur Beucher et de Monsieur Mignot, je fus inscrit pour une année d’étude supérieure ce qui m’a permis d’obtenir un sursis ; un de mes compagnons de promotion : Gilbert Bonhomme me rejoignit tout au long de cette aventure. Le choix de la pièce que je devais réaliser se porta sur la création d’un moule d’injection pour matière plastique ; le sujet ? Devinez ! Un petit grenadier de Napoléon. Modelage en plastiline, plâtre, gabarits en araldite, réduction des aciers au pantographe, reprise du moule en ciselure ; conjointement à ce travail, réalisation d’un dossier expliquant toutes les phases de la fabrication, avec photographies (prises par Monsieur Mignot), plans, croquis ainsi qu’une histoire du soldat de plomb. J’ai toujours ce dossier dans mes archives ainsi que deux tirages en étain de cette figurine. Si les objets ont une âme, c’est celle de ce maître vénéré dont j’aurais, tout au long de ma vie, comme référence : sa volonté, sa droiture, son savoir, son goût de l’esthétique, sa grande pédagogie.
Cette année passe trop vite, et au bout, pointe le service militaire. J’avais, sans grand espoir demandé la Marine Nationale ; vers le mois d’avril, mon affectation arrivant à la maison, ma maman téléphona aussitôt à l’école et demanda à parler à mon professeur, (tout cela, je ne l’ai su qu’après). Monsieur Mignot vient alors me trouver et discrètement me faisant part du coup de fil maternel, il me dit : « j’ai eu votre maman au téléphone, votre convocation est arrivée, pas de chance, vous êtes dans les parachutistes !». Il me laissa alors mijoter tout l’après-midi, et le soir, au moment de partir, il me dit en souriant : « mais non, Thébault (il prononçait toujours les deux dernières lettres de mon nom, alors qu’elles sont muettes) vous avez la marine !
Ouf de soulagement, suivi d’un grand éclat de rire… Sitôt mes 12 mois de service effectués sur un escorteur rapide, Monsieur Mignot me fit entrer aux établissements Perez spécialisés dans le moulage par injection de tous les petits sujets décorant entre autres les bûches de Noël ; ensuite, toujours sur ses conseils, ce fut Bijou-Fix pendant une année. Avril 1974, il m’annonça au cours d’une de mes visites à Boulle : « Thébault, il y a un concours d’entrée à la Monnaie, présentez-vous, même si vous n’y êtes pas préparé, ce sera une bonne expérience ». Quel encouragement de sa part ! Je fus évidemment recalé aux épreuves techniques, mais fort de cette expérience, je préparais alors le concours pour l’année suivante ; le samedi à Boulle avec Monsieur Lasnier pour la gravure de lettres, et le soir à l’école Estienne avec Monsieur Bessigneul pour la gravure de poinçons de lettres.
C’est ainsi que le 13 octobre 1975, j’arrivais dans cette noble maison, ce Saint -Graal de notre profession qu’était l’Administration des Monnaies et Médailles du quai de Conti. Quelle émotion et quelle fierté lorsque j’ai apporté ma première médaille (réalisée à titre personnel) à cet Homme qui avait été mon guide, mon Pygmalion, mon exemple dans le choix et l’exercice de la profession de graveur. Je garderai toujours de lui sa compréhension des autres au travers de son regard clair pénétrant qui savait si bien nous sonder. Chaque année, je lui envoyais les vœux de la Monnaie et il nous répondait toujours avec une extrême gentillesse.
Quand il disparut, j’assistais à son départ vers un autre monde au côté d’Élisabeth Cordier et de Gilbert Bonhomme ; notre peine fut immense et notre tristesse profonde. Lors de cette émouvante cérémonie, j’ai eu la surprise d’entendre, devant toute l’assemblée présente, la lecture de la lettre que j’avais envoyée à son épouse ; vous me croirez si vous voulez mais je crois que j’ai vu, dans la buée de notre tristesse, le sympathique petit sourire de Monsieur Mignot.
Si le temps peut atténuer les émotions, il n’en va pas de même pour la mémoire et je garderai, bien présent en moi, le souvenir d’un homme à la fois discret, chaleureux, bienveillant, grand pédagogue, capable de beaucoup d’indulgence envers ses élèves, rigoureux dans ses actes et sa pensée, d’une grande noblesse de cœur et d’esprit, en un mot d’un grand humaniste.
Courrier adressé à Madame Mignot. Paris, le 9 Septembre 2009.
Madame Mignot,
Monsieur Le Hir vient de nous apprendre la disparition de Monsieur Pierre Mignot. Quelle douleur soudaine a envahi mon âme ; je devais mes passions et ma carrière à la richesse de son enseignement, à ses conseils toujours sages et avisés, à la gentillesse de son accueil quand je suis entré à Boulle en 1964, à ses encouragements lors ce que j’ai passé le concours d’entrée à la Monnaie en 1975.
Chaque année de ma vie, j’ai toujours eu comme référence sa volonté, son savoir, son goût de l’esthétique ; il a été mon guide et mon exemple dans le choix et l’exercice de ma profession de graveur et je garderai toujours de lui sa compréhension des autres au travers de son regard clair qui savait si bien nous sonder.
Ma peine est grande, la vôtre doit être immense, aussi permettez-moi de la partager en vous transmettant ces mots de profonde reconnaissance que j’ai toujours eu à son égard.
Puisse cette missive avoir réussi à traduire tous ces sentiments très forts, que la parole n’est pas toujours suffisante à exprimer, et vous dire toute la tristesse que je ressens. Si le temps peut atténuer les émotions, il n’en va pas de même pour la mémoire et je garderais bien présent en moi le souvenir d’un homme à la fois discret, chaleureux, bienveillant, grand pédagogue, capable de beaucoup d’indulgence avec ses élèves, rigoureux dans ses actes et sa pensée, en un mot, d’une grande noblesse de cœur et d’esprit. Que toute l’amitié que j’avais pour lui soit un réconfort pour vous.
Jean-Yves Thébault
Jean-Luc RICHARD, élève graveur de 1965 à 1969, promotion 79.
jeanlucrichard3@gmail.com – 7 rue des Berges F-93500 PANTIN
Né en 1950, je suis un ami et camarade de promotion de Jean-Yves THEBAULT, arrivé en 1965 et diplomé comme lui en 1969.
J’ai choisi la Gravure sur Acier, parce que le professeur était « moteur et passionné ». J’étais le plus jeune de la promotion, 15 ans, et je souhaitais un atelier généraliste, incapable à mon âge de m’orienter sur un axe précis et définitif.
Pour ce choix après les trois premiers mois de découverte des ateliers de l’école BOULLE, une courte conversation avec M. MIGNOT m’a rassuré : « vous ne le regretterez jamais… » Ce qui s’est révélé exact.
Après quatre ans, je n’avais pas le niveau suffisant pour être vraiment Graveur… M. Mignot me disant diplomatiquement : « ce sera dur »… encore exact.
Passionné par le domaine du bijou, je me suis lancé dans ce domaine où j’ai fait carrière. Après le service militaire et quelques années dans divers emplois, j’ai pris la suite de Gérard PARRUITE chez un joaillier français à Caracas, puis me suis mis à mon compte au Vénézuela, où je suis resté 12 ans.
A chaque retour en France pour mes congés, souvent en janvier, je rendais toujours visite à M. Mignot.
Ses conseils et le suivi de ses anciens élèves sont toujours présents en moi ; je l’entends toujours me conseiller et me dire « Ah, Richard, un garçon comme vous, ce n’est pas possible… (de faire ça, ou de laisser comme ça…).
Si ça peut être mieux, il faut le refaire. Cette « maxime » a été un axe dans ma vie grâce à lui. Boulle m’a fait découvrir et appris l’esthétisme, M. Mignot la rigueur constructive. Il était plus qu’un professeur, c’était un éducateur.
Je lui dois énormément, tant dans la formation professionnelle que dans les rapports humains, les choix à faire, etc…
Aujourd’hui retraité, j’ai 69 ans, ma plus jeune fille s’oriente dans une carrière « artistique », après un master réussi avec mention, en création, graphisme et design (ce que je comprend mais qui m’angoisse…). Je retrouve en elle le goût de l’effort et la satisfaction d’un travail exécuté au mieux, inhérent à la gravure sur acier et à la formation de l’École Boulle…
Hélas aucune photo de l’époque, ce n’était pas encore la mode…
Bravo et merci de votre initiative.
Marie-Laure TARBOURIECH, élève graveur de 1991 à 1995, promotion 105.
J’ai découvert l’École Boulle aux portes ouvertes en février 1990, après deux années déplorables en classe de seconde indifférenciée, et une orientation difficile en 1ere Comptabilité-Gestion, mes parents acceptent mon désir d’aller dans une filière artistique. Mon père me fait faire le tour des écoles d’art ; il est graveur, ancien de Boulle (des années 1950 – 1955) et a l’époque délégué syndicale à la CGT Métallurgie de Paris et participe depuis plusieurs années aux Commissions Professionnelles Consultatives avec l’Éducation Nationale, il a participé à la création du DMA et à la rénovation d’un grand nombre de CAP. Il connaît beaucoup de monde dans les écoles et me présente à tous les professeurs. Maintenant, si je veux poursuivre mon rêve, je dois avoir mon Bac… et un dossier correcte pour être sélectionnée pour le concours d’entrée. J’ai enfin un but et au printemps 1991, j’ai le choix pour le concours d’entrée entre l’École Estienne et l’École Boulle.
Ce sera Boulle, et mon premier choix, la gravure en modelé.
Souvenirs…
Ma première année, en Mise a Niveau, je dois rendre ma première maquette et mon premier dossier à Mr Baduel, prof de composition décorative. C’est difficile, je passe une nuit blanche dans la cuisine de mes parents pour faire cette maquette. Le rendu est le jeudi matin, l’après midi, il y a atelier. Et Mr Mignot me donne mon travail du jour : détourer un poinçon en cuivre sur la fraiseuse. L’enfer quand on a pas dormi ! La machine n’est pas prévue pour les jeunes filles de moins de 1m60, j’ai les bras trop court, je suis sur la pointe des pieds, j’ai mal à la tête, au dos… J’ai du mal à rester concentrée pour suivre la ligne qui disparaît dans les copeaux, mais il faut faire le travail, le faire correctement, et pas question de se trouver des excuses.
Ses voyages avec son camion aménagé, je crois me souvenir que pour aller jusqu’au cercle polaire (le voyage en Norvège?), il n’était pas sûr de l’état mécanique de son camion, donc, il a emmené un moteur de rechange, juste au cas ou… Il habitait à quelques km de mes parents, un jour de grève RATP, il m’a raccompagné après les cours et j’ai eu l’honneur de monter dans son camion.
En Mise à Niveau en 1991, j’étais seule en gravure en modelé, puis en DMA1 et DMA2, j’étais dans la classe avec Fabrice FRANKIEL, Stéphane MOIROD, David PROST et Magali VALAT. En juin 1994, je rate mon oral d’atelier, il me manque une UV pour avoir le diplôme, alors je choisi de faire une année supplémentaire en n’allant qu’à l’atelier. En juin 1995, je suis diplômée en même temps que Thomas LACROIX, Christine LELIÈVRE et Olivier THORAX .
J’ai été embauché en mai 1996 à Beaune dans une jeune entreprise de gravure, on a déménagé après quelques mois sur la banlieue de Besançon. Pendant 10 ans, j’ai retouché des fers à dorer, des poinçons de marquages et des moules de thermoformages, puis fin 1995, l’entreprise a déposé le bilan. En janvier 1996, je déménage dans le haut jura, je suis embauchée par la manufacture Blancpain pour monter un atelier de gravure main et en 2011, je reçois le titre de « un des Meilleurs Ouvriers de France ».
Thierry CURTET, élève graveur de 1979 à 1983, promotion 93.
Je te remercie pour ton hommage à Mr Mignot.
Malheureusement, je ne pourrais être d’un grand secours… En effet, bien qu’ayant obtenu un C.A.P de graveur en modelé en 1982, j’ai intégré cet atelier en 1979 sans véritables motivations, » sur le souhait de mon père travaillant à la Monnaie de Paris « .
» j’ai le souvenir d’un professeur de petite taille , habillé d’une blouse beige, très rigoureux et aux yeux bleus perçants, capable de graver un poinçon sur une tête d’épingle… «
Dès mon Diplôme obtenu , je me suis orienté vers les métiers de l’agencement, principaux recruteurs des aeeb… de ce fait, j’ai perdu de vue ce magnifique métier d’art » mis à part la visite régulière du musée de la monnaie, quai Conti « . Ceci-dit, si tu le souhaites, je peux me joindre à la liste des anciens éléves, sans détails supplémentaires (Thierry Curtet – promotion 93) Je t’adresse mes remerciements pour la mémoire de Mr Mignot, et toutes mes félicitations, pour ta réussite de graveur.
Dominique SIMÉON, élève graveur de 1968 à promotion 82.
06 72 07 47 25
Cher Nicolas SALAGNAC, ci-joint mon courrier hommage à Pierre Mignot. Merci pour cette excellente idée. Cordialement
Hommage à Pierre Mignot.
Dans la Tôlerie « Thomas » à Montreuil 93100. Trois hommes : un professeur de sculpture, un professeur de ciselure, et un professeur de gravure.
Ses trois hommes sont venus pour visiter les ateliers de l’entreprise qui fabriquera la forge destinée à l’atelier de gravure de l’école Boulle. Ma mère « Andrée » travaille dans cette entreprise comme secrétaire-comptable. Elle profite de l’occasion pour dire à ses trois hommes que son fils « Dominique » souhaite passer des études liées au dessin et à l’art. C’est ainsi que de cette rencontre allait naître mon choix d’étude et de vie. Nous sommes en 1968, je prépare, en suivant les cours donnés le samedi par l’école Boulle, le concours qui allait me permettre d’entrer dans cette grande école. J’ai réussi à échapper à certaines charges de CRS autour de la place de la Nation grâce à ma pointe de vitesse. Déjà à l’époque, le peuple signifiait à son gouvernement son désir de changement.
Septembre 1968, réussite au concours et donc entrée à l’école Boulle avec comme choix d’atelier Gravure en Médaille, taille directe sur acier. Ce choix à conditionner ma vie. Cher maître et professeur « Pierre Mignot » être dans ton atelier, c’est rentrer dans une grande famille. Une famille que tu accompagnes au delà de la formation professionnelle, ta droiture, ton engagement, font de toi un second père. Tu veilles sur tes élèves, les accompagnes de façon paternel, mais sans lourdeur « tu veilles sur eux bien après la sortie de l’école ». Ta bienveillance et ton regard chaleureux et si perçant « des yeux comme un ciel de printemps », donne confiance, de façon naturelle, on sait que l’on peut compter sur toi dans tous les domaines de nos vies. Bien plus qu’un simple métier, il nous transmet un regard sur la vie ! Cette formation m’a fait grandir et m’a fait comprendre le sens des valeurs. Fin des études, diplôme, et entrée dans la vie active. Métier exigeant, avec une grande rigueur d’exécution (gravure au couvert) puis plus tard gravure en médaille à la Monnaie de Paris. Quel bonheur de pouvoir m’exprimer et m’épanouir dans cette discipline. Ma vie professionnelle a été un parcours enthousiasmant. Un jour une triste nouvelle, on m’informe que Monsieur Mignot est décédé. À ses obsèques, je ressentais fortement sa présence, cet homme qui n’est plus physiquement parmi nous, est toujours à nos côtés. Cet hommage est l’occasion de voir qu’un nombre important de professionnels liés à la gravure ont été les élèves et ont connu Pierre Mignot. Cet homme a rassemblé bien au-delà de l’école Boulle, il a accompagné plusieurs générations de ses conseils avisés et de sa magnifique vision de la vie. Cher professeur, cher maître, il est des liens qui jamais ne se défont, reconnaissance éternelle pour l’homme et pour la grande âme qui a guidé ton parcours terrestre.
Cécile LEGUERN (RENAULT), élève graveur de 1986 à 1991, promotion 100.
Maître Graveur à la Monnaie de Paris de Peyssac.
Construction dans la cave de mes parents du cadeau que je devais fabriquer pour mon parrain (un rabot épaississeur gonflable de 2,5 m de long), un système compliqué avec des ballons de baudruches et une bombe de mousse à raser, heureusement mon père m’avait aidé pour la construction, en plus il fallait que je trimballe ça dans le bus puis le train et le métro, mais je n’ai pas baissé les bras.
Le jour du baptême dans la cour de l’école Boulle transformée en aéroport pour le Baptême.
Toujours le jour du baptême, Yvan Hiot avec le casque.
Atelier de gravure, moi au centre : à ma droite, Elisabeth Gault, encore après Patrice Leguereau et à ma gauche je pense que c’est toi.
Patrice Leguereau en train de mettre de l’huile dans une machine, M Mignot et moi même en admiration !!!
Je fus élève de Monsieur Mignot de septembre 1986 à juin 1991, c’était un excellent professeur, sévère, attentif et paternel.
J’ai choisi l’atelier de gravure en modelé non pas pour les yeux bleus du prof (je préfère les yeux marrons) mais parce qu’il nous a décrit la gravure lors de notre visite en début d’année comme une technique qui s’employait dans nombre de métiers : du moule pour l’injection, à la matrice de médaille en passant par le gaufrage et les savonnettes. La gravure est impliquée dans d’innombrable métiers et c’était un gage de sécurité de l’emploi. Je suis actuellement maître graveur à la Monnaie de Paris et j’ai la chance de faire un métier qui me plait et qui est dans le prolongement de mes études. J’ai eu la chance de rencontrer dans ma vie des graveurs d’exceptions, des gens formidables et attachants notamment Pierre Rodier, Elisabeth Pectorin, et Jean Luc Maréchal évidemment, sans parler de mon mari. Hélas le métier de graveur se perd et disparaît petit à petit avec les derniers artisans qui emportent leurs secrets dans leurs tombes. J’ai rencontré dans l’atelier de gravure de l’école Boulle mon mari, Franck Renault, c’est pour cette raison que nous avons invité Monsieur et Madame Mignot a notre mariage. C’est pas tous les jours que l’on mari 2 de ses élèves !!
Deux anecdotes sur Pierre Mignot :
Tout le monde se souvient de Monsieur Mignot dans son costume 3 pièces toujours tiré à 4 épingles, aucun faux plis, toujours habillé pareil. Costumes beige ou grège, on dirait taupe aujourd’hui, peut être un peu plus clair en été et un peu plus foncé en hiver pour respecter l’ordre des saisons. C’était Madame Mignot qui lui confectionnait sa garde robe, une très bonne couturière : pantalons, vestes, gilets, cravates, elle fabriquait tout avec sa machine à coudre, la fierté de son mari.
Pierre Mignot avouons-le était assez rigide, pas du genre décontracté et sa tenue ne faisait que renforcer cette impression.
Un jour que j’étais restée dans l’atelier pendant la pause, surement parce que j’étais en retard sur un travail, Monsieur Mignot était à son bureau et moi à mon établi, un grand silence régnait dans l’atelier.
D’un seul coup, le professeur se lève de sa place et s’approche de moi. Je le vois qui arrive vers moi en bougonnant et maugréant. Il arrive à ma hauteur et pose son pied sur le tabouret à côté de moi puis il défait son lacet, retire sa chaussure et sort son pied en chaussette. Il commence à se masser le gros orteil à 50 cm de moi, j’avais les yeux écarquillé !!!
– Je me dis : mais qu’est ce qu il fait ? et là, il me dit : Ah ! Ces chaussettes neuves me font un mal de chien avec leurs grosses coutures !!!
– Ah Bon !!!
Je suis restée interdite, c’était d’une familiarité inhabituelle de la part de Monsieur Mignot. Peut être étaient-ce des chaussettes d’importation, surement pas des chaussettes tricotées avec amour par Madame !!! En tout cas, ce fut une grande source de fou rire avec mes potes de promo quand je leur ai raconté.
Seconde anecdotes :
Je ne sais plus en quelle année c‘était, j’avais une chambre de bonne boulevard Poniatowski métro Porte Doré. Je sortais à la station Montgallet pour venir et repartir de l’école. Je passais par un petit passage qui longeait l’école le long d’une résidence. Un soir en rentrant chez moi, je prends le même chemin et débouche sur la rue de Reuilly, sur le trottoir, un petit fauteuil style années 50 était abandonné. Les encombrants passaient le lendemain, il n’était pas trop abîmé, le tissus était déchiré mais l’armature en bois intact.
Donc j’ai eu le coup de foudre, je prends ce fauteuil dans mes bras. J’arrive à le porter jusqu’à l’école tant bien que mal, il était plus encombrant que lourd. Heureusement Monsieur Mignot était toujours à l’atelier, il faisait du rangement ou préparait des choses pour le lendemain. Je savais comme tout le monde qu’il possédait une espèce de camionnette camping-car qu’il avait aménagé entièrement, comme sa femme fabriquait des habits lui fabriquait un camping-car. Je pose le fauteuil dans la hall de l’école et retourne à l’atelier pour lui demander de bien vouloir me ramener chez moi dans son camping-car avec mon fauteuil en mauvais état, impossible pour moi de le transporter seule dans le métro.
J’ai insisté, il a accepté.
Depuis nous avons fait retapisser ce fauteuil par l’oncle de mon mari puis une seconde fois après un début d’incendie. Il est toujours en bonne place dans notre 3ème maison grâce à Monsieur Mignot, il restera toujours un bon souvenir.
Voilà Nicolas, je me souviens aussi que Mignot se trompait toujours dans les noms de famille et toi il t’appelait SALIGNAC au lieu de SALAGNAC, et quand il avait pris un nom de travers c’était pour toujours.
J’ai une photo de moi avec le cadeau pour mon parrain (un rabot épaississeur de 2,5 m de long). Je te la scanne dès que j’ai retrouvé l’album.
Marie-Line LEMOINE, élève graveur de 1988 à 1993, promotion 102.
Les poupées de Mariline – 8 impasse de l’Horloge – F63910 Vertaizon – 04 73 90 30 70 – 06 79 30 21 88 – marilinepoupees@gmail.com – Lien site web.
Ce fut long mais c’est fait, j’ai ouvert la boîte à souvenirs de 1988 à 1993, pour me replonger dans ce qui a été ma formation et qui finalement a orienté mon avenir professionnel.
Je me rappelle, à la sortie du collège malgré un carnet de notes qui m’ouvrait aux sections générales seuls la musique et le dessin m’intéressaient. Mes professeurs étaient incrédules. Mes parents étaient moins surpris. En 1988, mon seul choix en Auvergne c’était l’école d’Yzeure avec une formation moins complète que celle qu’ils proposent aujourd’hui, c’est pourquoi j’ai passé le concours de l’Ecole Boulle à 450 km de chez moi.
La gravure en modelé, je ne savais même pas que ça existait. C’est lors de la visite des ateliers que je l’ai découvert. Je me rappelle très clairement le regard de Monsieur Mignot et sa façon de nous présenter son travail, et de la peur qu’il avait suscitée chez certains de mes camarades. Je crois que l’exigence était inscrite dans sa façon de parler mais aussi dans sa tenue vestimentaire. Ce qui a retenu mon attention, c’est surtout sa passion. Malgré cela comme le tissu et la couture était dans mon ADN, mon premier choix est allé vers la tapisserie puis la gravure en modelé.
Je me souviens de la fabrication des outils. Pour moi, la forge c’était réservé aux gros balaises avec des muscles, une moustache et des poignets de force. Et bien avec le bon enseignement sur le métal, les règles de sécurité, on arrive à 15 ans et 45 kg à obtenir toute une série d’outils pour commencer le travail de gravure. C’est pas mal pour la confiance en soi et puis la bonne posture pour scier ou poncer, c’est un peu comme le vélo, ça ne s’oublie pas.
Finalement, quand on connaissait Monsieur Mignot, il était beaucoup moins impressionnant que lors de la découverte des ateliers. Dans mes débuts difficiles d’apprentissage de la liberté, il a été de bons conseils et surtout une référence de stabilité. Je me rappelle le compte rendu d’un conseil de classe où plusieurs professeurs trouvaient mes parents inconscients de m’avoir laissée partir si jeune faisant écho aux réactions dans ma propre famille. Il m’a défendue et m’a dit croire en ma force de caractère. Je crois qu’à ce moment précis, je n’avais surtout pas envie de le décevoir.
A l’atelier, une de nos premières réalisations est née de notre faculté à nous disperser. Mon voisin d’atelier Guilhem avait appris à faire des grenouilles en papier. Il nous a enseigné la technique sur l’établi. Nous avons été pris sur le fait en pleine origami, et bien obligés de faire la démonstration de notre nouveau savoir-faire à notre professeur. Il n’a rien dit puis est revenu vers nous : “la grenouille en papier devrait être transformée en gravure”.
On a appris que les sujets d’inspiration sont divers et fortuits.
Comme beaucoup, j’ai en mémoire ses récits de voyage, ses conseils mais également son départ à la retraite qui a été pour moi une rupture dans l’enseignement. Lors de ma dernière année, je devais réaliser deux matrices pour mon projet. Tout s’est bien passé jusqu’au passage sur la fraiseuse à reproduire. Lors de la finition, la machine s’emballait en détruisant tout mon travail ainsi que les fraises les unes après les autres. Suite à plusieurs tentatives avec toujours le même problème et aucune solution, je me suis résolue à téléphoner à Monsieur Mignot pour lui expliquer et avoir des conseils techniques.
Il a fait mieux que ça. Il est venu, à détecter l’erreur de montage qui empêchait la machine de fonctionnait correctement. Ceci m’a permis d’avoir une pièce à présenter pour le diplôme. Je ne cesserai jamais de le remercier pour cette intervention.
La sortie des études et l’entrée dans le monde du travail a coupé les liens avec l’Ecole Boulle. J’ai tout d’abord travaillé pour un monument historique aux visites et à la communication puis donné des cours de modelage mais ce qui m’intéressait c’était la porcelaine. J’ai donc fait des formations complémentaires dans le moulage céramique et la restauration pour me spécialiser plus particulièrement dans les poupées qui avaient l’avantage de joindre mes deux passions le modelage et la couture. Depuis 22 ans, je remets en circulation des poupées anciennes bien-sûr mais aussi des statues signées, des automates déguenillés, des santons en cire d’église ou le plat de mamie dégommé par le chat…
Que reste-il de ma formation dans l’atelier avec Monsieur Mignot ?
Une vive curiosité, le sens de l’expérimentation, un goût pour les détails et une certaine rigueur qui me permettent encore aujourd’hui de comprendre la logique de certaines fabrications.
Bruno LIVRELLI, élève graveur de 1983 à 1989, promotion 97.
L’arrivée dans l’atelier de gravure sur acier ! Un atelier en longueur, rempli de machines outils, avec un établi à vingt ou trente places ! Et tout au fond, devant la presse à estamper les médailles, le bureau de monsieur Mignot.
Pierre Mignot, personnage de bande dessinée, cheveux courts, bouc, yeux bleus clairs, vêtu d’un costume beige, confectionné par son épouse.
Au premier abord, un homme distant, rigoureux. Mais rapidement, je me suis rendu compte que c’était un professeur très attentif au bien être de ses élèves, paternaliste, et toujours tout aussi rigoureux !
Chaque jour passé à ses côtés nous donnait l’occasion d’entendre de sa bouche une anecdote sur le travail en atelier lorsqu’il était graveur, sur les vacances passées avec son épouse dans son camping car à travers l’Europe, ou même sur son apprentissage à l’école Boulle !
Je me souviens tout particulièrement d’un travail pour préparer un bloc d’acier, travail que j’effectuais sur l’étau-limeur… Ce jour là, j’ai commis une imprudence, et la machine c’est mise à couiner ! Monsieur Mignot qui était à côté avec monsieur Macardier est arrivé en courant pour voir quelle catastrophe était en train de se tramer… Je m’attendais à une volée de bois vert ! Je n’ai eu de sa part qu’une question : « vous n’êtes pas blessé ? ».
L’erreur fait partie de l’apprentissage…
Merci monsieur Mignot pour cette rigueur, pour la technique enseignée et pour le gout du travail bien fait !
Isabelle JOLLY, élève en gravure en modelé de 1981 à 1987, promotion 95.
Isabelle à l’atelier de gravure en modelé en 1985.
Préparer le concours de l’école Boulle et le réussir, j’étais stupéfaite ! Un chapitre inconnu s’ouvrait…
Lors de mon arrivée dans cette école, en septembre 1981, je me suis sentie un peu perdue. Fille d’enseignants, vivant très protégée en banlieue, je ne comprenais pas tout ce qui m’arrivait. Lors de la visite de rentrée, je trouvais l’atelier de « gravure acier », sombre et un peu triste, j’ai détesté la couleur verte des machines. Le fait de descendre un peu sous le niveau du rez-de chaussé et cette sensation d’industrie, l’odeur du métal et la longueur de l’atelier. C’est Mr Mignot qui m’a convaincue, en mettant en valeur la diversité des possibilités de la formation et tout son potentiel. Michel Baduel, ami de mes Parents, lui-même « second premier prix de Rome 1963 en gravure en médaille », ne m’avait pas vanté les mérites de cet atelier. Pour ne pas m’influencer sans doute !
Plus tard, j’ai aimé m’assoir à la fenêtre du long crescendo de notre progression annuelle, face à la rue Pierre Bourdan : « de la forge, au bureau ! » J’y ai passé de nombreuses heures avec celui qui est, encore aujourd’hui, mon ami, Hubert Latrobe. Il a supporté tous mes états d’âmes, sautes d’humeurs, chagrins et joies. Rien n’échappait vraiment à Mr Mignot, mais il restait toujours discret. Et malgré son autorité naturelle et sa rigueur, il avait toujours beaucoup d’empathie pour nous, ses élèves, qu’il défendait chaleureusement. Et je pense que je lui dois d’être restée et d’avoir persévéré 6 années au sein de cette école, que j’ai quitté en juin 1987 après avoir obtenu le diplôme de l’école et expérimenté le premier DMA.
Entre temps l’atelier avait changé de nom, nous étions dorénavant en « gravure en modelé »! Le centenaire était passé par là.
Je n’avais pas l’intention de devenir graveur… Et certaines choses restaient mystérieuses : comme la division rivale du bois et du métal ou la difficulté à expérimenter les autres ateliers en cours de formation (j’y suis quand même parvenue, grâce et avec Mr Lasnier). Les filles étaient aussi arrivées en plus grand nombre à l’école. En septembre 1981, nous n’étions que 10 sur 60 élèves entrant !
De l’enseignement de Mr Mignot, j’ai sans doute tiré beaucoup de choses qui sont venues s’installer au fur et à mesure de ma vie professionnelle. La rigueur et la persévérance dans le travail, que je n’avais pas nécessairement à cette période d’adolescence, l’importance de la présentation, une grande curiosité pour les métiers de l’artisanat et surtout des connaissances techniques très diverses que j’ai essayé d’acquérir constamment. J’ai gardé certains de mes outils fabriqués lors de mon cursus à Boulle, malgré mes nombreux déménagements. Je les ai parfois réutilisés à d’autres fins ou sur d’autres matériaux que l’acier, mais je les ai toujours choyés!
En sortant de l’école Boulle j’ai travaillé quelques mois comme assistante dessinatrice de bijoux chez « Établissement Brun » à Paris. Là, j’ai réalisé que je ne savais rien, malgré notre école prestigieuse et toutes ces années d’études. J’ai saisi une opportunité et je suis partie étudier une année aux États Unis dans une université de l’Ohio, où j’ai étudié le bijou, la photo et l’histoire. Puis j’ai travaillé 3 années comme dessinatrice de bijoux à Londres.
Lorsque je suis revenue en France début 1992, je suis allée aux portes ouvertes de l’école. Mais Je fus déçue de ne pas y voir Pierre Mignot. Il venait de prendre sa retraite…
C’est à ce moment-là que la maison Poiray (Paris) m’a ouvert ses portes. J’ai créé de nombreuses collections, ainsi que «le cœur Poiray», au cours de ces 4 années. Puis je suis partie en Italie, où les sirènes d’un joaillier Anglo-Suisse m’appelaient ! Là ce sont les princesses du Golf Persique qu’il fallait parer ! J’ai enfin cessé ma collaboration avec cette entreprise après 15 années de voyages, de déménagements, de projets riches et variés, et deux enfants !
Pour finalement changer de direction en 2012. L’enseignement me tendait les bras ! Je suis maintenant professeure dans un CFA en Haute Garonne où j’enseigne le dessin, le design culinaire et le volume à des pâtissiers et des chocolatiers. Cette fermeté alliée à l’empathie, que Pierre Mignot savait gérer, ont sans doute un impact dans ma façon de faire le métier que j’exerce aujourd’hui.
SOUVENIRS ET ANECDOTES DES ANCIENS COLLÈGUES DE PIERRE MIGNOT.
Jean GUÉNOT – Professeur de ciselure à l’école Boulle de 1958 à 1991.
Photo de Jean Guénot (merci Jean-Luc Maréchal).
Caricature des élèves, de Jean Guénot en Nounours avec Nicolas et Pimprenelle.
Pierre Mignot était un ami très sensible. Je l’ai vu pleurer et je l’ai consolé lors de la disparition de Pierre Macardier (professeur de tournage) notre ami commun.
Lors de ses voyages, il photographiait le monde qu’il voyait, n’hésitant pas à attendre des minutes interminables pour fixer sur sa pellicule une fleur pour avoir le meilleur éclairage et la mettre en valeur. « Monette » sa femme était là pour lui fournir les objectifs demandés pour les prises de vue. Un dimanche où nous étions invités ma femme et moi ainsi qu’un collègue avec sa femme, nous avons assisté à une projection photographique tout en fondu-enchainé avec deux projecteurs Leica positionnés de manière millimétrique et de niveau bien sur ; c’était magnifique de beauté et de sensibilité.
Je ne peux me rappeler toutes les discussions que nous avons eues ensemble, deux petites anecdotes me reviennent à l’esprit :
Il n’a pas hésité à faire reprendre le mur de son garage par des ouvriers car il avait vu à l’oeil un faux équerre de 1 cm dans la verticalité.
Et un jour je lui est dit avec humour en forcissant le trait « toi, tu travailles au dixième de millimètre alors que moi c’est au centième de mètre ».
Voilà ce que je peux dire sur mon ami Pierre Mignot. Mes souvenirs sont assez lointains et cela fait presque 30 ans que nous nous sommes quittés.
Alain POMMIER, professeur de Monture en bronze du 12 septembre 1973 au 28 Septembre 2003.
Photo prise en 1989 devant le ministère de l’Éducation Nationale, avec cette plaque commémorative du bicentenaire de la révolution française, commémoration initié par le Ministre Jean-Pierre Chevènement.
Les élèves qui ont participé à ce travail, mise en œuvre et posé sont : Nicolas Trousselle, Nathalie Matasova et Marc Prigent, Stéphane Grandpeyre prend la photo.
Ces trente ans sont passés bien rapidement, l’ambiance de l’École alors et la qualité des élèves en sont la raison.
J’ai quitté Boulle avec beaucoup de nostalgie.
Le temps s’écoule inexorablement, c’est ainsi.
Nicolas, je te prie de bien vouloir excuser le temps que j’ai pris pour te répondre. Je croyais posséder quelques documents sur lesquels figuraient Pierre Mignot, malheureusement ma mémoire s’est révélées défaillante et mes recherches sont restées vaines. Ma contribution rendue au souvenir de Pierre Mignot est donc modeste et seulement épistolaire.
J’ai fais la connaissance de Pierre Mignot quand je suis arrivé à Boulle, comme enseignant, en 1973. Ce que je retiens de ce premier contact, c’est un regard bleu acier pénétrant, vif et profond. Rien d’original dans ce que j’exprime, d’autres que moi ont certainement vécu le même ressenti. Derrière ce regard se tenait un homme poli, courtois, intègre. A le côtoyer j’ai compris sa sincérité, sa probité. Pierre Mignot exécrait la langue de bois, c’était un homme de conviction. Pour lui les choses devaient être exprimées franchement sans faux semblants. Il était d’une grande exigence, autant pour lui même que pour les autres. Pierre Mignot n’acceptait pas la facilité ou la médiocrité. Toutefois, discrètement, avec sagesse, il savait être d’une grande indulgence, notamment envers ses élèves dont la réussite scolaire le préoccupait constamment ainsi que leur devenir comme adultes responsables.
Nos techniques respectives n’appelaient pas à collaborer de manière fréquente. Néanmoins, dans les instants où j’ai dû faire appel à lui, j’ai toujours rencontré un collègue serviable et efficace.
En résumé voilà ce que j’ai retenu et ce que je peux évoquer de Pierre Mignot. C’est bien mince, j’en ai conscience mais ce dont je suis certain c’est que Pierre Mignot fut « un homme de qualité » et il mérite que son souvenir soit honoré.
Jean-Jacques LAPOIRIE, Professeur de sculpture et en BTS Expression Visuelle à l’école Boule de 1971 à 1998.
jj.lapoirie@orange.fr – Site web
Devant le Foyer des Jeunes où nous étions pensionnaires, passage Charles Dallery Paris 11ème, vers 1951-52. De gauche à droite, Christian Theureau, tapissier promotion 50-54. Michel Dumas, ébéniste promotion 51-55, J-J Lapoirie, sculpteur sur bois promotion 50-54 et Bouteiller, (Jai oublié son prénom) sculpteur sur bois dans le faubourg.
Jean-Jacques LAPOIRIE à l’occasion du dernier voyage de Pierre Mignot.
Je suis entré comme élève à l’école Boulle en 1950. À cette époque il existait une séparation assez nette entre ”le bois et le métal”. Il était demandé aux élèves des sections bois de porter des vêtements de travail marron, et, bleu pour ceux des sections métal.
Quand je suis revenu à l’école Boulle en tant que professeur de sculpture, les choses avaient beaucoup changé, mais cette séparation était encore ressentie fortement. Les professeurs techniques quittaient peu leur atelier respectif. Les projets communs étaient rares et nous avions peu d’occasions, en dehors des conseils de classe, de nous rencontrer. Cela fait que je connaissais mal Pierre Mignot. Je sais depuis peu son prénom.
Toutefois, Mignot n’était pas un inconnu pour moi et nul ne pouvait ignorer son existence d’autant plus qu’il se manifestait assez souvent d’une manière véhémente en conseil de classe pour défendre ses élèves ou protester contre certaines dispositions administratives qui lui semblaient contestables.
Nous nous sommes évidemment croisés à l’école lorsque nous étions élèves mais je n’ai pas de souvenir de lui de cette époque. Par contre, quand je suis arrivé en 1971 en tant que professeur, j’ai été frappé par son physique et comme d’autres l’on dit par ce regard clair et pénétrant qui contrastait avec une pigmentation et une chevelure de brun tout à fait affirmées. Il émanait de sa personne une certaine rigidité, une rigueur dans le maintien, dans la tenue vestimentaire toujours stricte et conventionnelle : costume gris cravate assortie (des collègues disaient que c’est son épouse qui lui confectionnait ses costumes et qu’elle ne manquait jamais de lui fabriquer en même temps une cravate du même tissu).
Je n’ai pas pu m’empêcher de faire un rapprochement entre son aspect général en parfaite adéquation avec son métier et la matière, l’acier dur qu’il travaillait avec talent. L’éclat du métal poli équivalant à celui de son regard clair et lumineux. Sa détermination semblait forte comme celle de la presse quand le poinçon frappe le flan de métal et l’écrase dans la matrice pour le transformer en médaille.
J’ai ressenti Mignot comme quelqu’un de diamétralement opposé à nous qui travaillions le bois, matière si différente du métal, mais le contact avec Pierre Mignot révélait un tempérament plus chaleureux qu’il n’y paraissait au premier abord. Il aimait à raconter ses voyages avec son camping-car aménagé par ses soins à sa mesure. Je ne m’attendais pas à ce que ce personnage d’apparence plutôt rangée, entreprenne des voyages aussi lointains et aventureux. Mais il ne les faisait pas sans une méticuleuse préparation et ne partait jamais sans avoir emporté des provisions lui permettant de vivre en toute autonomie pendant toute la durée du voyage.
Quand Pierre Mignot m’a annoncé son départ à la retraite, (était-il déjà malade à cette époque?), il m’a dit qu’il comptait sur dix ans de vie en bonne santé, 10 ans qu’il consacrerait aux voyages, sa passion.
J’ai su que Mignot pratiquait la photographie d’une manière quasi professionnelle avec l’aide précieuse de son épouse qui, souvent, utilisait l’inséparable casquette de Pierre pour protéger l’objectif des rayons du soleil à l’occasion de prises de vue à contre-jour.
Charles BARJONET, Professeur d’histoire de l’art et des styles de 1967 à 1996.
Croquis de Charles Barjonet de Pierre Mignot.
Témoignage.
Avec Pierre Mignot, nous sommes arrivés presque en même temps comme professeur à l’école Boule en 1967. Nous avons connu l’un et l’autre ces journées fort inédites de mai 68. Les petits gars de Boulle avaient pris le train en marche… Essentiellement en restant chez eux… Seuls quelques quatrièmes années participaient à des tables rondes pour la rénovation de la pédagogie à l’école. Mignot n’y était pas présent contrairement à moi. Il voyait dans ses événements un grand gâchis : les élèves de quatrième année n’ayant pu, loin s’en faut, terminer leur chef-d’œuvre comptant, pour le diplôme ; d’où à la rentrée suivante l’attribution d’un diplôme “au rabais”, ce qui ne pouvait que le désoler, étant donné ses exigences professionnelles.
De temps en temps, je poussais la porte de l’atelier pour jeter un coup d’œil sur les travaux de nos élèves communs. Pierre m’accueillait avec cordialité et prenait plaisir à me fournir les explications techniques qui me manquaient. Nous nous rencontrions aussi lors des conseils de classe ou il donnait de ses élèves un portrait font juste étant donné qu’il les connaissait mieux que tout autre (vu le temps conséquent qu’il passait avec eux).
Pierre Mignot s’est battu en vain pour obtenir la création d’un brevet de technicien pour les graveurs acier. Par contre, ce qui était plus intéressant pour tous les ateliers d’ailleurs, c’était la création du DMA, le diplôme des Métiers d’Art. Pierre ainsi que ses collègues des autres ateliers mais aussi des professeurs d’enseignement général planchèrent sous la houlette de mon ami Claude Font, chef des travaux pour mettre au point ce diplôme reconnu sur le plan national.
Me revient une anecdote concernant son exigence extrême pour la précision de toute réalisation… et qui lui joua un tour. L’origine de cette anecdote fut sans doute un de ses collègues d’un atelier du bois ”se non è vero, è ben trovato”.
Pierre avait réalisé un meuble avec des tiroirs (pour son camion). Le travail avait été exécuté au 1/10e de millimètres près. Ses tiroirs fonctionnaient parfaitement par temps sec mais ils avaient pu être ouvert par temps de pluie… Pierre n’était pas habitué à tenir compte des variations hygrométrie du bois…
Habitants tous les deux à deux stations de RER l’un de l’autre, Pierre m’avez invité à venir le voir dans son pavillon situé non loin de l’A. 86 à l’époque de la réalisation de cette autoroute, il avait manifesté avec d’autres riverains contre les futurs nuisances sonores…).
Lors de cette visite, il m’avait parlé de sa nouvelle installation de chauffage central pour laquelle il avait trouvé les ouvriers bien peu professionnels et, les ayant congédiés, il avait terminé le travail lui-même, si je me rappelle bien. Il m’avait montré le produit de son hobby : la réalisation de locomotive à vapeur à l’échelle 1/15e ce qui permettait d’en admirer les détails. J’étais émerveillé comme un gamin par la beauté de ses modèles réduits. Il m’avait fait profiter de son autre hobby : la photo. J’avais eu droit à une projection en fondu enchaîné de son dernier voyage en Norvège, jusqu’au Cap Nord à bord de son fameux camion Volkswagen. Superbe vue des “Stavkirke” (les églises en bois médiévales) ainsi que des paysages de fjords et de la flore des régions parcourues.
De très belles lumières et de non moins belles couleurs, ceci grâce à des prises de vues très étudiées. Il me disait combien son épouse le secondait, ce que rapporte si bien Jean Guénot Jean-Jacques Lapoirie et Virginie Malaquin. La visite s’était terminée par la dégustation d’une tarte confectionnées par Madame.
Michel HUDAN, professeur de Menuiserie en Sièges.
Du 5 Janvier 1968 au 25 Juin 2003 prenant la suite de mon ancien professeur Monsieur Raymond GILLET, admis à la retraite en 1967.
Meilleur Ouvrier de France en 1982, Président régional honoraire d’Île de France à la Société Nationale des Meilleurs Ouvriers de France.
Mes souvenirs s’estompent avec le temps mais Pierre Mignot reste dans ma mémoire un collègue plein de qualités professionnelles et de qualités de cœur, un vrai “Hussard de la République”.
Les ateliers du Bois et du Métal ont, pour des raisons diverses été isolés les uns des autres depuis je pense la création de l’établissement. Cela tient certainement aux matériaux utilisés, ce qui fait que nous avions des « Chapelles » respectives en plus d’un certain esprit d’individualisme qui régnait et cela n’était pas fait pour arranger les choses, mais tout ceci étant dit, l’esprit supérieur de notre école prévalait pour nous tous en fin de compte.
Donc mes relations avec mon collègue Pierre Mignot n’étaient pas très soutenues, mais cependant très courtoises.
Il me revient en tête deux anecdotes pour définir ce professionnel de talent et très méticuleux, c’était environ deux ans avant notre voyage à la « Réunion », il traverse la cour et vient dans mon atelier et me dit : « Michel, j’ai un grand service à te demander, ( là, j’envisage le pire !) et il ajoute : mon épouse (Monette) à une nouvelle machine à coudre, mais elle ne porte pas parfaitement sur la table où elle l’utilise, alors il me faudrait, si cela est possible, me préparer trois cales pour la stabiliser convenablement ».
J’étais rassuré provisoirement sur l’importance de la demande, car je n’avais jamais rencontré cette dame auparavant, mais à ce point… Je me suis vite rendu compte qu’il avait « déteint » sur elle, ce qui est normal dans un bon couple… Il me tendit un papier en me disant : « ce sont les côtés que Monette a relevées, si tu peux les respecter, ce serait parfait ».
Les cales devaient être d’épaisseurs différentes, de mémoire : 4,8mm, 3,9mm et 2,7 mm !!! ( j’ai bien dit de mémoire car cela fait presque trente ans, alors…)
Je savais qu’il possédait chez lui une petite combinée à bois ( j’avais la même à mon domicile, une Lurem 260 N, bonne petite machine, qui m’a rendu bien des services). Je lui expliquais alors que dans nos professions « du bois », il était d’usage d’usiner au millimètre et non pas au dixième et encore moins au centième comme dans certaines professions du métal, mais que je ferai mon possible pour être au plus près.
Le lendemain, je lui ai déposé les trois cales, qui sont passées immédiatement « à la toise » et après avoir constaté le respect des critères, il a ajouté que dans les « boiseux », il y avait aussi des gens de métiers, précis et rapide, « nous étions rentrés en amitié ».
La deuxième anecdote se déroule sur l’Île de la Réunion pendant notre séjour, comme nous faisions deux conférences chaque soir dans des villes différentes, avec à chaque fois un prof et un élève de l’école dans une spécialité connexe.
Pour ma part, je faisais équipe avec une étudiante de sculpture sur bois, Mademoiselle Anne Léhovetzki. Nous étions séparés en deux groupes le soir pour nos interventions, ce qui fait qu’au bout de deux ou trois séances passées ensemble, cela nous avait permis de parfaire nos duos, il en était de même pour les autres intervenants.
Ceci avait permis de dégager du temps libre pour organiser des visites genre « touristiques ». Alors, un jour où nous partions en vadrouilles, je me suis retrouvé à conduire notre petit bus. Nous étions au milieu de nulle part, parti pour je ne me rappelle plus quelle destination (vous voyez que c’est précis) quand tout d’un coup, j’ai entendu à l’arrière, la voix de Pierre Mignot qui sur un ton intransigeant, s’écriait « stop », recule d’une dizaine de mètres (rassuré de n’avoir écrasé personne), je m’exécutais et il sortit promptement du bus, son appareil photo en main pour photographier le paysage !
Je lui ai dit qu’il pouvait le dire sur un ton plus convivial, mais en guise d’excuses, il se mit à m’expliquer que depuis un bon moment, il cherchait à faire une photo, mais qu’à chaque fois, il y avait des fils électriques ou des poteaux qui dérangeaient son cadrage et de nous dire que sur ses diapos, jamais des fils viendraient troubler sa prise de vue !
Lorsque nous avons tous passé nos diapos au retour, lors d’une soirée organisée par les étudiants, c’est d’un commun accord que nous avons été tous obligé de reconnaître qu’il avait les plus beaux documents photographiques, « sans fils et sans poteaux »…
Ces deux anecdotes pour mettre en exergue les grandes qualités de ce professionnel hors norme !
Rentrés d’excursion, le réconfort de l’hôtel de Saint Gilles les Bains, notre groupe de l’école Boulle ( de gauche à droite) :
De dos Monette épouse de Pierre Mignot ; Pierre Mignot ; Michel Hudan ; au fond notre chef ds travaux Claude Bournillat ( victime d’un méchant moustique qui le contraindra à passer presque la totalité de son séjour Réunionnais à l’hôpital de Saint-Denis en soins) ; Serge Laverdet et Madame ; Emmanuel Lemagnen commissaire de l’artisanat local ; Virginie Malaquin et Monsieur Bénizot adjoint d’Emmanuel.
Dans un paysage typique de la Réunion : les deux Pierre : Mignot (décédé en septembre 2009) à droite et Ramond (décédé le 24 Octobre 2015) et moi à gauche.
Michel BADUEL, élève graveur d’Eugène CANNÉE en 1947 à 1952.
Michel Baduel a reçu un prix en tant qu’élève en quatrième année, avec un article dans la presse. C’est la première année, où il était possible de faire une cinquième année. Il aura créé une médaille de diamètre 70 ou 80 mm, en hommage aux premiers alpinistes qui ont les premiers gravi l’Annapurna, en 1952.
Puis service militaire 12 mois, et ensuite concours pour rentrer à l’école des Beaux Art en sculpture, avec comme professeur Henry Dropsy et puis Raymond Corbin.
Puis il aura été architecte d’intérieur, et il rentre à l’école Boulle comme professeur de dessin et déco.
L’école Boulle avec une organisation par Madame Plane proviseur adjoint et Mr Quereau, avec trois jours de cours : lundi mardi, mercredi et libre les jeudis et vendredis pour travailler comme artiste : le dessin, la sculpture et l’art de la médaille.
Avec Pierre Mignot, ils sont deux élèves d’Eugène Cannée, Michel en 1947 et Pierre en 1949. Contact amicaux entre deux collègues beaucoup d’estime et admirations réciproques…
Une création en médaille marquante par Michel Baduel :
Médaille de la fonction publique française, avec une carte de France, diamètre environ 80 mm face revers modelé, le revers a été soufflé par directeur du cabinet du ministre Anicet Lepors, frappée par la Monnaie de Paris en 1982. Il a fournis des maquettes plâtres.
Claude FONT, ancien élève tapissier 1952-1957, professeur d’architecture intérieure – chef de travaux – retraité.
J’avais beaucoup d’estime pour notre collègue Pierre et je suis ravi qu’on lui rende hommage.
Toujours aimable, disponible, il entretenait de bonnes relations avec ses élèves et leur transmettait avec talent « l’amour du métier ».
J’ai eu la chance d’apprécier pleinement la qualité des objets que cette ambiance engendrait, particulièrement un jour où, dans le cadre d’un projet pédagogique école Boulle-Québec, j’ai été chargé par notre ministère, et très heureux d’avoir à offrir à cette occasion au ministre Québéquois un superbe plateau gravé, en argent.
A l’aéroport de Montréal les douaniers fédéraux, éblouis mais intrigués par cet objet, sourds à mes arguments, m’ont condamné à une amende sévère pour « trafic d’œuvre d’art » !!! (rassurez-vous, les Québéquois m’ont remboursé !)
Cela démontre, s’il le fallait, le savoir-faire des élèves et l’extrême qualité des ouvrages issus des ateliers de notre chère école. Ma fonction en ce lieu m’a donné à plusieurs reprises l’occasion de les apprécier pleinement.
Olivier LEBOSSÉ, professeur de tournage d’art depuis 1991.
Hommage à Pierre Mignot. Le 19 03 2019
Bonjour Monsieur Mignot… Bonjour Lebossé !
La poignée de main est ferme, directe et le regard… Acéré !
Aujourd’hui encore, après bien des années, le souvenir de cet homme exceptionnel, passe, sans qu’il soit possible d’y échapper, par ce regard puissant et pénétrant, affûté comme un cristal bleuté.
L’homme n’est pas très grand, mais, taillé au carré dans sa blouse brun clair, aussi ajustée au corps que son bouc au visage, il impressionne tous ceux qui l’approchent, à commencer par le gamin de 15 ans que je suis à l’époque.
Il n’est pas mon professeur « direct » puisqu’en charge de l’atelier de « gravure acier ». Mitoyen avec le tournage, où j’ai fait mon temps d’École, je vais le saluer chaque jour, matin et soir, tout comme pour mon propre professeur, Monsieur Macardier.
L’espace est ouvert entre les deux plateaux. Il n’y a en effet qu’une voûte à franchir pour passer de l’un à l’autre. Mais en dépit de cette proximité architecturale, les univers sont distincts ; tant par l’ambiance que par leur représentant respectif. Bruyant et remuant pour le tournage, où l’on produit les pièces rapidement, avec moult poussière et copeaux. L’enclume y résonne souvent, et on s’y déplace fréquemment d’un poste à l’autre, d’une machine à l’autre encadrés par un géant débonnaire tout en jovialité. Quel contraste avec la gravure acier, cloître silencieux, où en dehors des « Tic Tic Tic Tic… » lancinants des marteaux sur les burins on entend une mouche voler (quand le tournage se calme bien sûr…). Tous les élèves y sont assis, comme attachés à leur boulet, chacun face à son établi, en ordre quasi militaire, concentrés pendant des semaines à tailler leur bloc d’acier sur quelques millimètres carrés ; le tout en silence, et surveillés par ce regard qui ne laisse rien échapper… Ce sont deux mondes qui cohabitent, deux mentalités, deux métiers ; avec à leur tête, deux professeurs qui n’ont en commun que leur exigence professionnelle et leur prénom. L’accord est parfois ombrageux…
Il n’empêche que lorsque je viens à le saluer, je reçois toujours bon accueil de la part de Monsieur Mignot dont le visage s’éclaire et le regard, l’instant d’un sourire, s’adoucit. Quand il me serre la main, le vouvoiement est bien sûr de rigueur et le prénom n’existe pas, juste : Lebossé ! Mais il passe tant de choses par ces yeux bleus…
J’en étais là de mes souvenirs d’École quand, dix ans plus tard, en juin 1991, je reçois un appel téléphonique qui va bouleverser ma vie.
Installé comme artisan bronzier, je cherche à cette époque à embaucher et former car l’activité se développe. Malheureusement, face aux difficultés rencontrées, j’envisage de stopper le fonctionnement artisanal classique pour, après une année « sabbatique », redémarrer sur d’autres statuts, plus propices à la création.
Or, c’est justement Monsieur Mignot qui m’appelle. Après une courtoise mais brève discussion sur ma situation, la proposition tombe : Suite au décès de Monsieur Macardier, l’atelier de tournage risque de fermer si aucun repreneur sérieux ne se présente. Ce que ne veulent en aucun cas, les professeurs des autres ateliers (conscients de son potentiel de formation), à commencer par Monsieur Mignot qui est à l’initiative d’un concours auquel il me demande de me présenter. Bien que peu enthousiaste à l’idée de quitter mon entreprise pour intégrer l’éducation Nationale, je me laisse cependant convaincre de tenter l’épreuve quitte à voir après…
Sauf que… reçu, et dois alors prendre une décision.
J’hésite vraiment, c’est pour moi un tel changement de vie, une telle responsabilité. Mais, cette fois encore, Monsieur Mignot sait trouver les mots qui font mouche ; Les enjeux sont tels, et je dois tant à cette École… Elle m’a tant apporté, que puis-je lui refuser ?
En septembre 1991, je découvre donc Boulle, « mon » École, sous un jour nouveau. D’élève, je suis devenu professeur. J’y retrouve à l’époque nombre de ceux que, seulement dix ans plus tôt, je traitais avec tant de respect, et qui maintenant, m’invitent à les tutoyer !!! Heureusement, Monsieur Mignot, avec sa réserve habituelle ne me demande pas l’impossible et, de toutes façons, lui-même me vouvoie toujours.
Cela ne nous empêche pas de nouer une réelle amitié, empreinte de respect mutuel. Confiance qui ira jusqu’à me permettre de découvrir une partie de l’univers de cet homme si secret. Son goût pour les voyages aventureux et les reportages photo qu’il en faisait, sa passion pour les modèles réduits manufacturés de magnifiques petites locomotives à vapeur en laiton, chef d’œuvre de mécanique. Un goût pour la peinture abstraite que je n’aurais jamais soupçonné chez cet être si cartésien, son camping-car « self made », le seul véhicule susceptible de se vendre plus cher à 100 000km que neuf, son pavillon, meublé, décoré et rangé avec une rigueur quasi monacale, et surtout, son « trésor » à lui, son épouse ; une femme douce et effacée qui vit littéralement dans l’ombre de son homme, pour son homme, et ne lui survivra d’à peine un an lorsque, atteint d’un cancer incurable, il disparaîtra.
De ses derniers instants, je garde un double souvenir.
Celui d’une ultime conversation téléphonique peu de jours avant sa mort où avec sa réserve et sa pudeur coutumière, il m’annonçait sa fin toute prochaine. En dépit d’immenses souffrances, il ne se plaignait pas, sauf de ne pouvoir achever tous ses projets, et surtout, surtout, de devoir « abandonner » sa femme…
Son incroyable dignité, y compris face à l’horreur, fut encore une leçon qu’il me donna.
Celui enfin de ce regard qui, une dernière fois, se posa sur moi lors d’obsèques aussi sobres que l’homme pouvait l’être. Très peu de monde, un dépouillement total. Il avait souhaité partir sans bruit, sans discours, sans fleurs ni cérémonial. Il y avait juste, posée sur son cercueil, une unique photo, un petit portrait qui nous fixait tous encore si intensément que cette image restera à jamais imprimée dans ma tête.
Pour avoir eu le privilège de côtoyer l’homme, je dirais que sous l’impressionnante armure de fer, il y avait un être dont la profonde sensibilité ne demandait qu’à se révéler. Les principales anecdotes qu’il m’a racontées de ses voyages étaient presque toujours centrées sur ses rencontres avec les autres. Et de son expérience d’enseignant, que j’ai eu le plaisir de partager pendant sa dernière année d’activité, il a souhaité me transmettre une ligne de conduite faite d’exigence, d’écoute, de justice et d’humanité.
Peut être, comme tout un chacun, avait il des défauts ? Le fait est que durant toutes les années où nous avons partagé, je n’en ai vu, ni perçu aucun. Il est à ce titre, et aujourd’hui encore, un de ces modèles qui ont, à des degrés divers, construit ma vie.
Et s’il avait comme peine latente de ne pas avoir eu d’enfants, le paradoxe est qu’en fait, il en a eu des dizaines : ses élèves peuvent tous en témoigner…
Pour conclure ce bref portrait, je dirais qu’il est curieux de voir comment un métier, un matériau peuvent faire l’homme. Ou peut être est ce l’inverse ? Et là encore, je ne serai ni le premier ni le dernier à faire le parallèle entre Pierre Mignot et son acier. En apparence dur et froid pour qui ne le connaissait pas, il semblait taillé en un cube rectifié sans défaut ni aspérité. Sauf que, tout comme pour son acier, il y avait sur une face cachée du bloc un décor, une gravure en creux, un modelé à la finesse inattendue et qui pouvait devenir, pour qui savait écouter, une véritable matrice.
En recherche : Claude DUBOIS, ancien proviseur ; Gérard (??? est-ce le bon prénom ??) WICK (Vick) ancien proviseur adjoint ; Joël Bernard, prof de tapisserie ; Madame Plane, proviseur adjoint.
ÉLÈVES DE PIERRE MIGNOT
de 1962 à 1991 :
En gras, les personnes contactées. Pierre Mignot arrive en 1962.
1962, atelier gravure en modelé, promotion 76
BERGEVIN Georges,
JOURDAIN Alain,
MANTEY Jean-Pierre,
MARÉCHAL Jean-Luc,
MESMIN Jean-Pierre,
BRIÈRE Louis,
1963, atelier gravure en modelé, promotion 77
DENIS Claude,
LACELLE Marc,
PIERDA Gérard,
1964, atelier gravure en modelé, promotion 78
BOUQUET Gérard,
LE DUC Rémy,
LEMARCHAL Henry,
NOIR Philippe,
PARRUITÉ Gérard
1965, atelier gravure en modelé, promotion 79
BONHOMME Gilbert, †
RICHARD Jean-Luc,
THÉBAULT Jean-Yves,
THOREL Daniel,
1966, atelier gravure en modelé, promotion 80
BRETON Roland,
DRUSSANT Jacques,
JUNDT Nicolas,
LALLEMAN Alain,
RABOISSON Dominique,
TURIOT Bernard,
1967, atelier gravure en modelé, promotion 81
COLIGNON Baudouin,
FLORENT Joël
SEEGMULLER Gilles,
SEGUIN Jérôme,
VOLKART François,
1968, atelier gravure en modelé, promotion 82
DUBOC Patrick,
HERBIN Didier,
ROUSSEL Christian,
SIMÉON Dominique,
WINTENBERG Philippe,
1969, atelier gravure en modelé, promotion 83
BREUILLARD Didier,
DUBOSCQ Gérard,
DUCLAIR Hervé,
LEHIR Bernard,
ORVELIN Philippe,
VICTOR Stéphane,
1970, atelier gravure en modelé, promotion 84
DAVESNE Christian,
DELCEY Michel,
DELMEURS Didier,
GUIONNET Jean-Michel,
HERAULT Bertrand,
RENAULT Françoise,
TOULON Alain,
1971, atelier gravure en modelé, promotion 85
BOUET Pierre,
COUVREUR Michel,
DARMON Philippe,
DELCAYRÉ Marie-Cécile,
ORILLON Dominique,
ROBIN Philippe,
1972, atelier gravure en modelé, promotion 86
CORDIER (PECTORIN) Elisabeth,
GAU Pascal,
LEMAITRE Hugues,
PUISSÉGUR Didier,
1973, atelier gravure en modelé, promotion 87
BELLOIR Jean-Patrick
FAYTRE Régis
HOUEIX Philippe,
SIMON (GABLE) Nelly
1974, atelier gravure en modelé, promotion 88
DURAND Corinne
LAVAUR Dominique
LEPRAT Frédérique
SONNET Serge
1975, atelier gravure en modelé, promotion 89
BOUCHARD Christian
LEVERRIER Bruno
LOTTIER Pascal
TESTE Alain
1976, atelier gravure en modelé, promotion 90
ANDRÉ Claire
BOURGOIN Vincent
CHAPLET Eric
CHÉMEREAU Pierre
PAUPE Jean-Pierre
1977, atelier gravure en modelé, promotion 91
BEER Béatrice
CONRAD Cyrille
JOISSEAUX Bernard
SARTI Raymond
SCHNEIDER Chantal †
DENIS Eric
DUPUIS Jean-François
1978, atelier gravure en modelé, promotion 92
GUFFROY Joël
LOEFFLER Sabine
1979, atelier gravure en modelé, promotion 93
CHABENET Jean-Pierre
CLAQUIN Thierry
COZON Nicolas
CURTET Thierry
PROTAT Isabelle
1980, atelier gravure en modelé, promotion 94
LESTARD Armand
MASSELOT Agnès
RAOUX Agnès
1981, atelier gravure en modelé, promotion 95
JOLLY Isabelle (pièce de diplôme avec l’arbre du voyageur),
LATROBE Hubert
RENAULT Franck
STREIGNART Eric
1982, atelier gravure en modelé, promotion 96
ANSEL Marc
BREL Sophie
BRETILLOT Marc
FOURNAISEAU Chrystelle (pièce de diplôme “Les cyprès de Van Gogh”).
GAUTIER Laurent
1983, atelier gravure en modelé, promotion 97
LIVRELLI Bruno,
PRADEL Philippe,
MERCKY Franck
ACAT Lionel
1984, atelier gravure en modelé, promotion 98
COURTILLÉ Isabelle
BEAUSSIER Isabelle
Florence BATARD,
HIOT Yvan,
TOPSY Prakash,
1985, atelier gravure en modelé, promotion 99
STAAT Claudine,
FISCHER Christelle,
LESSAGE Bruno,
SALAGNAC Nicolas
1986, atelier gravure en modelé, promotion 100
LE GUERN Cécile,
LEGUEREAU Patrice,
GAULT Elisabeth
DEHON Érika
1987, atelier gravure en modelé, promotion 101
De PARSEVAL Alice,
Christine CELLY,
Johann MERIOT,
Laurent DÉTRÉE.
1988, atelier gravure en modelé, promotion 102
CHARRON Guilhem
DOLET Céline
LEMOINE Marie-Line
ROSSILLON Cécile
1989, atelier gravure en modelé, promotion 103
FRANKIEL Fabrice
MOIROD Stéphane
PROST David
VALAT Magali
1990, atelier gravure en modelé, promotion 104
GUILLEVIN Véronique
LACROIX Thomas
LELIÈVRE Christine
THORAX Olivier
Passage de relai de Pierre MIGNOT à Bernard LE HIR
1991, atelier gravure en modelé, promotion 105
AYNIE Gérald
TARBOURIECH Marie-Laure
1992, atelier gravure en modelé, promotion 106
BORDIER Sabine
DANIEL Peggy
1993, atelier gravure en modelé, promotion 107
DEUTSH Anne-Claire
LETTELIER Yann
SPORTELLI Hélène
Informations sur Pierre Mignot :
Pierre Mignot est né le 15 Août 1932.
Il était malade et il décède d’un cancer de la prostate, je crois, en 2009.
Il habitait au 11ter rue Docteur Barrée 92160 ANTHONY.
Son téléphone était le 01 43 50 58 01